Ses velléités d'hégémonie et sa scission supposée d'avec Hattab semblent l'avoir irrémédiablement perdu. Amari Saïfi, «Abderazak El Para» pour ceux qui prisent les noms de guerre des chefs de groupes armés, semble sur le point de perdre «sa» guerre, au moment même où il a réussi le coup médiatico-terroriste le plus spectaculaire de l'année. Son groupe a réussi à négocier sa fuite vers le Mali en emmenant avec lui, les otages européens, en leur possession depuis plus de cinq mois, mais il semble aujourd'hui, irrémédiablement perdu dans le désert du nord-est du Mali, entre les services spéciaux, des aventuriers alléchés par «la prime de capture» et des populations de plus en plus hostiles. Toutes les hypothèses envisageables ne permettent pas d'espérer une autre issue que celle de la mort ou fr la capture. Avec 60 millions d'euros en poche, rançon demandée pour libérer les 14 otages, dont 4 sont très très malades, Abderazak El Para ne peut échapper de nouveau au maillage qui s'est refermé sur lui, dans une terre hostile, qu'il connaît très peu, coupé de ses relais et appuis en Algérie. Même son plus fidèle allié, Mokhtar Belmokhtar, ne peut plus lui être de quelque secours. Son ambition démesurée, sa lutte de leadership avec Hacène Hattab et son tempérament de battant et de commando rompu à la guérilla, l'ont emmené à tenter de perpétrer une action spectaculaire qui lui permettrait d'asseoir son propre pouvoir tout en discréditant son chef et émir national de Gspc, Hacène Hattab. Le rapt des 32 touristes européens dans le Sahara algérien a provoqué un tel bruit dans les médias internationaux qu'il était devenu possible pour Abderazak El Para de voler la vedette à Hattab. La déconfiture d'Amgrid, où 17 touristes avaient été délivrés par les troupes spéciales de l'armée, a déjà donné un avant-goût sur l'avenir du n°2 de la hiérarchie militaro-terroriste du Gspc. La fuite spectaculaire vers le Mali a été ressentie comme une victoire par le groupe qui détenait encore les 15 touristes restants. 10 Allemands dont une femme décèdera, 4 Suisses et 1 Néerlandais. Mais le repli malien n'a pas été aussi prometteur que les ravisseurs le pensaient : ni le soutien logistique, ni l'appui des Touareg rebelles, ni encore moins les caches sûres n'étaient au rendez-vous. Aujourd'hui, c'est pratiquement un chef fini, et on ne peut que suivre le dénouement de l'affaire des otages pour connaître le sort qui lui sera réservé. Est-il effectivement parmi les preneurs d'otages? Beaucoup pensent que oui, et il n'est pas exclu que Hattab prie pour que son plus dangereux rival soit tué ou capturé en terre malienne. Abderazak El Para, ex-membre des troupes spéciales de l'armée, est un homme imposant par sa carrure et son esprit de guerrier. Né un 1er janvier 1968 à Guelma, selon les avis de recherche lancés contre lui par le commandement de la Gendarmerie nationale, un 23 avril 1966 à Guelma, pour les services de renseignements de l'armée. Il a habité la commune de Bouhachana, daïra de Boucheghouf, dans la wilaya de Guelma. Dès 1988, il adhère à l'islamisme et l'année d'après, il commence à montrer ses dispositions pour l'instauration d'un Etat islamique en Algérie. Djoundi contractuel - et non officier déserteur de l'armée comme le suggèrent les médias occidentaux - des troupes spéciales, il est condamné par la juridiction militaire de Constantine à trois mois de prison ferme pour le chef d'inculpation : infraction aux consignes générales de l'armée. Des sources au sein de l'armée affirment qu'il a déserté en 1991. C'est-à-dire en plein délire de l'ex-FIS face à un pouvoir «en fin de règne», avec le grade de sergent de l'active dans un corps de commandos stationné à Biskra. D'autres sources soutiennent qu'il a été radié des rangs de l'armée à partir du 30 avril 1991 pour fin de contrat. Islamiste convaincu et haineux envers les autorités, il rejoint naturellement la guérilla menée, alors, par le GIA. Très rapidement, il est promu au rang de chef, et, à l'époque de Zitouni, il est membre de la direction du GIA. Fin 1996, le plébiscite contesté de Antar Zouabri l'éloigne du GIA. Avec Hattab, Saâdaoui et les autres membres séparatistes, il crée le Gspc, né officiellement en septembre 1998 dans la région kabyle. Abderazak El Para, chef parmi les chefs, et promu n°2 de la hiérarchie militaire de l'organisation armée prend le commandement de la 5e zone, qui comprend les régions de Batna, Tébessa, Oum El-Bouaghi et Sétif, villes et maquis qu'il connaît bien. Spécialisé dans les attaques surprises contre les contingents de militaires et les rondes de police dans l'Est du pays, il était devenu au fil des jours la hantise des services de sécurité. A partir de 2002, il commence à prendre ses distances avec son chef et n°1 du Gspc, Hattab Hacène. Son penchant pour les «coups médiatiques» l'ont poussé à s'attaquer aux touristes européens enlevés à la fin du mois de février 2003 dans le «triangle de feu» Tam - Illizi - Ouargla.