De Berlin à Alger, l'artiste remonte les sentiers qui le mènent vers son public original... Nostalgie quand tu nous tiens ! Lumière tamisée sur scène. Et brusquement la salle plonge dans le noir. C'était jeudi dernier à la salle Ibn-Khaldoun. L'établissement Arts et Culture de la wilaya d'Alger avait attrapé un beau poisson dans ses filets pour le programme culturel de cet été. Il n'avait plus remis les pieds dans son pays depuis 10 ans. A peine arrivé à Alger, on lui met le grappin dessus et on lui peaufine un programme sur mesure. Certes, fait un peu dans la précipitation, dans l'excitation des retrouvailles, la hâte et la fébrilité de retrouver cet homme, cette même voix, belle et attendrissante, un peu cassée, ce qui fait son charme, élégante et sensuelle.. Et voilà qu'un beau jour, l'artiste retrouve le chemin de «la maison» qui l'a vu grandir et s'épanouir doucement sur la voie artistique. Mohamed Réda, puisque c'est de lui qu'il s'agit, revient enrichi de moult expériences, humaines et musicales, la somme de ses rencontres à travers le monde. De Bab El-Oued à Berlin, le chanteur met le cap vers une nouvelle destination qui sera pour lui, prometteuse. Aujourd'hui mûri, l'artiste arpente fièrement les tréteaux de la salle et renoue avec le bain de foule de la capitale qui croule sous le soleil du mois d'août. Quand le silence est là, place à la musique frétillante. Juste le temps de retrouver ses marques et de poser sa voix et nous voilà plongés dans les années 94, année de l'assassinat de Hasni et de bien d'autres tristes événements. Seul assis aux commandes d'un piano, tout de beige, élégamment vêtu, les cheveux tirés en arrière, Mohamed Réda est séduisant à regarder. Il inaugure son concert par Rayha Ouine, chanson phare et son deuxième album. Plutôt sobre et épurée avec des pointes jazzy dans ses déclinaisons, l'interprétation de la chanson, quoique un peu déroutante, parvient à capter l'oreille de l'auditoire. Mohamed Réda promet une belle rétrospective des plus jolis morceaux qui ont fait les beaux jours de son parcours. Mais le maître mot de la soirée est le chaâbi...personnalisé, rajeuni. «Moderniser le chaâbi pour le rendre accessible à la génération actuelle», est d'ailleurs le viatique de Mohamed Réda. Entouré maintenant de musiciens, Fateh au banjo, Kheiredine au violon, Sofiane à la derbouka, Youcef à la batterie, Fouzi à la basse et un autre Youcef à la flûte, Mohamed Réda entonne «Adji tchouf kesat ghram el karn al achrin», réarrangée façon chaâbie après avoir été plus pop jadis. Il rend hommage à El Badji en reprenant une de ses chansons «thedet maâk ya kalbi», chanson qui figure sur son deuxième album Rayha Ouine. chanson qu'il dit interpréter avec une vive émotion. Elle sera suivie par «Ouine n'batou ida tah eleyl» qui sera appuyée de youyous. L'artiste fait une incursion dans Expérience son nouvel album, sorti récemment, chez Laser Production avec «Nar dj'mar el houb chaâla» plus connu sous la forme de «Aïb alik anti m'henya» que Guerrouabi a rendue célèbre puis la fête s'emballe avec «Ouahed El Ghozaïel» et «Chehlet laâyani». Entre-temps le violoniste nous aura servi une plage de mélodies très enivrantes. Et puis une première pour cet artiste originaire de Béni Yéni, Mohamed Réda chante en kabyle une très belle ballade «Housh housh» qui figure sur son dernier album, finissant ainsi la soirée en beauté et en douceur. Le public en redemandait. Promis, le chanteur prévoit un retour flamboyant à la rentrée. Patience donc. En attendant reste à déguster sans modération son nouvel album : Expérience disponible chez tous les bons disquaires.