Une telle opération exige une certaine technicité et maîtrise de la part des ingénieurs. «Or ce n'est pas le cas chez nous du moment que l'on a confié les travaux à des universitaires débutants sans aucune expérience et ce, afin d'économiser sur le coût de l'opération, qui exige une certaine technicité et maîtrise de la part des ingénieurs», clame Abdelkrim Chelghoum, invité à la rubrique «A coeur ouvert» qu'organise l'Expression régulièrement, M.Chelghoum, docteur de renom en génie sismique et président de la commission de suivi des travaux de réhabilitation, n' a pas manqué d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur la façon qui, selon lui, n'est pas du tout recommandée, dont s'effectuent les travaux de réhabilitation des bâtisses affectées par le séisme du 21 mai dernier. Cela dit, les gens compétents ne manquent pas, il faut seulement, dira le docteur, les solliciter et surtout mettre à leur disposition le budget «qu'il faut» pour un résultat certain. En réalité, l'Etat a fixé, pour cette rénovation, un budget dérisoire, estime notre interlocuteur. Pis encore, la même somme est allouée aux entrepreneurs et ce, en dépit de la nature de travaux qu'exige la bâtisse à réhabiliter. «L'estimation des coûts doit être en fonction des travaux de la réhabilitation de chaque bâtisse», souligne-t-il. Le chemisage des poteaux et le colmatage des fissures ne suffisent pas pour solidifier des bâtiments fragilisés à plus de 50%. Ce qu'il faut, explique l'expert, «une étude de simulation qui testera le comportement de chaque bâtisse en cas de séismes de différentes magnitudes». Notre interlocuteur n'occulte pas la possibilité d'un autre séisme d'une magnitude importante dans l'Algérois qui peut mettre en péril la vie des gens qui habitent ses bâtisses mal réhabilitées. «Ma conscience professionnelle m'interpelle pour aviser les pouvoirs publics sur ces imperfections de la réhabilitation que j'ai constatées sur le terrain». Pour les quelques recommandations préconisées par l'expert pour remédier à cette situation d'anarchie et de désordre dans la réhabilitation, on citera : l'Etat doit responsabiliser les ingénieurs concepteurs et leur donner tous pouvoirs afin qu'ils puisent de leurs connaissances pour entreprendre ces travaux sans contrainte aucune, placer des gens expérimentés à la tête des équipes chargées de la réhabilitation, procéder au recyclage des ingénieurs chargés de cette mission et enfin revoir le coût de la réhabilitation. «La finalité est de consolider convenablement les bâtisses touchées par le séisme, peu importe le temps et le coût de cette opération», insiste notre interlocuteur. Sidéré par la manière dont se gère le budget alloué à la recherche scientifique, le docteur tire à boulets rouges sur le secteur responsable qui n'injecte, selon lui, pas suffisamment d'argent afin de permettre aux chercheurs de développer et pousser leurs investigations, notamment dans le domaine de la sismologie. «12,4 milliards de DA ont été alloués, dans le cadre du plan de la relance au secteur scientifique, seulement 5 à 6% du budget ont été consommés.» Cet état de fait n'arrange guère le développement du secteur qui manque beaucoup d'instruments et de matériel scientifique pour la réussite de la recherche. «L'erreur qu'avait commise le Craac dans l'estimation de la magnitude du séisme n'est pas liée à son incompétence mais plutôt au manque de moyens fiables de mesures», dira le docteur. Ces moyens dont parle notre interlocuteur peuvent être facilement acquis si le ministère délégué à la Recherche éprouve suffisamment de volonté à développer le secteur et par conséquent dégager l'argent qu'il faut.