Décidément, nos institutions n'arrivent pas à faire simple quand ils délivrent un message aux citoyens. Jeudi dernier, répondant à une question orale, au Sénat, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, Tayeb Louh, a soutenu que «seules 3975 microentreprises étaient insolvables, soit 2,82% de l'ensemble des microentreprises créées». Pour le chiffre de cet «ensemble des microentreprises créées», c'est-à-dire le total national, il faudra repasser ou faire le calcul soi-même. Quand on n'est pas doués, comme nous, en «calcul» l'opération est un casse-tête. Allons-y, tout de même, pour l'effort. Cela donne, sauf erreur, plus de 120.000 microentreprises créées avec l'aide de l'Etat. En termes de communication et de message à l'adresse de l'opinion publique, il est plus positif de dire que sur 120.000 microentreprises créées, seules 4000 ont capoté. La marge de risque apparaît, au plus profane des profanes, clairement et dans des normes largement acceptables. Ce qui en définitive veut dire que la politique d'aide de l'Etat aux jeunes qui créent une microentreprise n'est pas un échec. Plutôt positive sur un double plan. Susciter chez nos jeunes l'esprit d'entrepreneuriat et dans le même temps lutter contre le chômage. Combien d'emplois ont généré toutes ces microentreprises? Là aussi, les citoyens devront faire le calcul eux-mêmes. Le ministre s'est contenté d'indiquer que «21.767 microentreprises ont été créées en 2011 et ont permis la création de 49.159 postes d'emploi». C'est d'une précision remarquable. Sauf que l'information est partielle et incomplète. D'abord qu'en est-il des emplois créés depuis le lancement du dispositif? Ensuite et puisque nous sommes encore en 2011, on ne saura pas à quel mois ont été arrêtées les statistiques du ministre. Au premier trimestre ou à la fin du mois d'octobre dernier? Ce qui est loin d'être sans importance. Tout laisse croire que le ministre a cité les microentreprises entrant dans le cadre du dispositif Ansej. On n'en est jamais sûr quand on est obligé de lire dans les pensées de l'orateur. Mais les deux autres dispositifs, celui de l'Angem qui s'adresse aux plus de 18 ans qui veulent créer leur propre emploi à domicile et celui de la Cnac destiné aux jeunes chômeurs entre 30 et 50 ans qui veulent lancer leur propre projet d'investissement, s'ils s'inscrivent dans le même objectif de résorption du chômage sont de natures différentes. Aussi, pour en savoir plus, nous sommes allés à la «pêche» de l'information. D'abord, sur le site Web du ministère. Rien sur les statistiques des microentreprises. Celui de l'Ansej: très sympathique avec le mot du directeur général, mais toujours rien. Pas de statistiques et pas de chance non plus du côté de la Cnac qui se contente de donner «un aperçu des projets». Pourquoi seulement un aperçu? L'administration a ses raisons que la raison ne connaît pas. Comme nous ne sommes pas du genre à baisser les bras facilement nous avons insisté dans nos recherches. Voilà le résultat: en dix ans (1997-2007) l'Ansej comptait à son actif la création de 81.125 microentreprises. L'année d'après, en 2008, nette accélération. La DG de l'époque déclarait à la Chaîne III qu'au «31 mars 2008 quelque 86.000 microentreprises ont été créées au niveau national (et que)... l'Ansej s'active actuellement à étudier 9000 autres dossiers de postulants». Un regain dû, selon elle, à la décentralisation, à l'accompagnement et à la formation des postulants. Trois années après, nous en sommes à 120.000, soit 10.000 créations chaque année. Par l'Ansej? Par la Cnac? Par l'Angem? Ou les trois à la fois? Nous sommes revenus de la «pêche» avec la besace vide. Les «bunkers» de la communication institutionnelle sont imprenables. Drapeau blanc!