Les journalistes et assimilés de la wilaya de Tizi Ouzou ont organisé, hier, une marche de protestation contre la suspension des six titres de la presse nationale. Cette marche, qui se voulait un énième signe de la corporation contre l'injustice et la tentative du pouvoir de faire taire l'unique tribune de la libre expression dans le pays, s'est ébranlée du square du stade du 1er-Novembre à 10h. Soutenus par les délégués de la Cadc, le MAK, le RCD, le MDS, le syndicat de l'hôpital, le collectif des avocats des détenus du printemps noir ainsi que par des universitaires, des étudiants et des citoyens anonymes, les journalistes fortement représentés, avaient, en signe d'indignation, la bouche scotchée tout au long de la manifestation. Munis de banderoles où l'on pouvait lire: «Non au bâillonnement de la presse», «La presse a déjà trop payé», «Non à l'instrumentalisation des imprimeries», les journalistes ont recueilli des marques de sympathie et de solidarité tout le long de l'itinéraire qui les a menés du stade du 1er -Novembre au siège de la cité administrative en passant par la rue Ahmed-Lamali, la maison de la culture Mouloud-Mammeri, le square Mohamed Oulhadj et la cité le Cadi. Les ârchs, qui ont sans cesse apporté leur soutien à la presse, étaient aux avant-postes de la marche symbolique. Ainsi, Idir Aït Maâmar, Belaïd Abrika, Mustapha Maâzouzi et d'autres avaient le rôle de guest stars de la manifestation. Arrivé devant le siège de la wilaya, le doyen de la presse locale et non moins chef de bureau du quotidien Le Soir d'Algérie a fait lecture d'une déclaration rédigée par le collectif de la presse de la wilaya de Tizi Ouzou. Ainsi, après avoir rendu hommage à tous ceux qui ont répondu présent «au modeste appel», le collectif a précisé qu'il a décidé que «cette marche doit être symbolique pour éviter tout dérapage en ce moment de crise particulièrement grave (...) mais aussi parce que notre région a terriblement souffert et continue de souffrir des provocations, des dérapages et de la répression». Par ailleurs, le collectif a affirmé que «les créances réclamées avant terme, aux six journaux suspendus ne représentent qu'un cinquième des créances détenues par les mêmes imprimeries sur d'autres publications». Or «cette suspension, estime le collectif, est venue compléter l'arsenal répressif entre les mains du pouvoir». Pour cela «l'opinion nationale et internationale n'est pas dupe et sait que derrière le paravent commercial se cache la volonté de fermer si possible pour toujours tous les journaux non complaisants». Pour conclure, le collectif appelle la société à se mobiliser «pour instaurer des règles d'accès et d'utilisation des médias lourds et des moyens d'impression». A la fin, tous les présents ont observé une minute de silence à la mémoire des confrères assassinés avant de se disperser dans le calme en se donnant rendez-vous pour la prochaine lutte. Pour sa part, la coordination des ârchs de Larbaâ Nath-Irathen a rendu publique hier une motion de soutien à la presse nationale dans laquelle elle dénonce «la honteuse tentative du pouvoir de museler et de dilapider le principal acquis des luttes démocratiques». A ce titre, la coordination de Larbaâ Nath-Irathen juge que le seul tort des six titres suspendus est celui d'«avoir osé mettre à nu superbement les frasques et la corruption à grande échelle des hauts dignitaires de ce pays». Dans ce sens, elle souhaite que «toutes les forces vives et démocratiques, éprises de justice et de liberté, méditent longuement sur cet acte arbitraire (...)» et «exhorte celle-ci à plus de vigilance et d'union pour achever ce tristement célèbre clan d'Oujda dont la panique et l'agonie s'affichent de plus en plus sur le terrain».