Face à la persistance du fléau, les autorités sanitaires maintiennent la gratuité des médicaments jusqu'à nouvel ordre. Pour la période comprise entre le 1er juin et le 24 août, les services de la prévention au ministère de la Santé ont établi le chiffre de 20.000 cas de conjonctivite virale, rien que pour Alger et sa proche périphérie. Il faut dire que le département d'Aberkane qui a établi en chiffres l'évolution des au-tres pathologies épidémiques coutumières, était loin de prévoir une telle flambée virale. Quelque temps avant la déclaration de cette dernière, c'est la méningite virale qui sévissait particulièrement dans quelques wilayas de l'Est comme Bordj Bou Arreridj et Bouira. Au départ, les premiers cas de conjonctivite ont été constatés d'abord à l'hôpital de Beni Messous, où le service ophtalmologique a été envahi par plus d'une centaine de cas en moins d'une semaine; tous les porteurs de la maladie étaient des jeunes hommes qui s'étaient «aventurés» dans les eaux de baignade peu sûres du fait de leur forte pollution, notamment à l'ouest de la capitale. Même la prestigieuse plage de Club-des-Pins n'a pas échappé au diagnostic. Aujourd'hui, et du fait du climat «tropical» caractérisé par une forte canicule et un taux d'humidité record favorisant l'incubation du virus de la conjonctivite, ce sont d'autres wilayas limitrophes ou lointaines qui sont touchées à l'instar, croit-on savoir, de Constantine, Blida. Par ailleurs, la flambée épidémique inquiète de plus en plus population et autorités médicales, à telle enseigne que le ministère de la Santé met le paquet en matière de campagne de sensibilisation en direction des citoyens pour amortir l'impact du fléau viral: quatre spots publicitaires/jour sont diffusés par l'Entv. Les professionnels de la santé n'ayant de cesse d'attirer l'attention des biens portants de faire preuve de vigilance en matière d'hygiène collective et individuelle, vu le fort degré de contagiosité de la maladie bénigne mais gênante. Tout en mettant un point d'honneur à la nécessité du diagnostic précoce. Il faut rappeler que ce type d'affection qui échappe à tout plan de vaccination, a trouvé le lit d'une évolution rapide et record; d'autant que le virus de la conjonctivite est très actif et d'un «génie déroutant» d'où sa réapparition en force ces derniers jours, depuis mercredi dernier en fait. Un lit fait de mauvaises conditions d'hygiène et de promiscuité dans les quartiers populaires de la capitale. Mais surtout une situation environnementale désastreuse. Nombreux sont les praticiens à avoir établi un rapport de cause à effet entre la pollution de ce dernier et l'apparition endémique du mal. Les rives gavées d'impuretés ont fini par rejeter tout leur fiel au visage des estivants. Beaucoup de plages ont été transformées par «la force des choses» en vrai dépotoir et déversoirs à ciel ouvert des déchets industriels auxquels s'ajoutent les produits nauséabonds des égouts et conduites éventrées. Ainsi, la conjonctivite n'est en fin de compte que la cerise sur le gâteau d'un été de tous les dangers; au départ il y eut Kehaïlia où la peste a émergé faisant plus de neuf cas de peste bubonique, avec en prime la mort par septicémie d'un enfant. Plus tard, des cas sporadiques ont été relevés çà et là mais l'on a toujours repéré le foyer du mal médiéval dans cette localité rurale de l'Oranie, Kehaïlia, et où les investigations d'une équipe de l'OMS et de spécialistes algériens se poursuivent, sachant que l'état d'alerte nationale concernant la peste se poursuivra jusqu'à décembre prochain. Finalement, c'est carrément sur un fond épidémique que la réforme hospitalière prônée par le ministre de la Santé, est menée. Une réforme contestée au départ, à la suite de la tentative d'instauration par circulaire interposée du fameux ticket modérateur qui a donné lieu au syndrome Aïn El-Fakroun, cette localité du fin fond de l'est du pays où l'on aurait refusé des soins d'urgence à une femme enceinte pour une simple raison financière. L'incident a vite fait réagir les autorités qui ont sursi à l'application de la circulaire administrative introduisant les soins payants. En somme, de Aïn El-Fakroun, via Kehaïlia jusqu'à «Club-des-Pins», c'est toute la problématique du système de santé algérien qui fait surface et interpelle sur les choix urgents à faire. Mais pour le chantier de la santé, les Algériens ont-ils encore le luxe de la proposition?