Près d'un million de travailleurs de la fonction publique ont perçu des hausses substantielles dans leurs salaires. La bipartite, qui a pris fin vendredi matin après 16 heures de négociations non-stop, a décidé d'une augmentation de 20% de la prime de rendement des fonctionnaires des corps communs, des personnels de l'administration locale et de certains corps spécifiques. Cette augmentation, comme nous l'annoncions en exclusivité dans une précédente édition, qui prend effet à partir du 1er septembre 2003, concerne 877.000 agents de la fonction publique. Les corps communs et ouvriers professionnels (soit 320.000 agents) verront leur prime de rendement passer de 10 à 30% tandis que celle des personnels de l'administration communale (245.000 agents) passera de 5 à 25%. Les corps spécifiques (245.000) bénéficieront, pour leur part d'une prime de rendement de 20% et les personnels des administrations de souveraineté (présidence de la République, services du chef du gouvernement, intérieur, affaires étrangères) auront une augmentation de 20% de la prime de sujétion. Une enveloppe de 30 milliards de dinars a été consacrée à cette valorisation, tant attendue par les fonctionnaires. L'Ugta avait proposé initialement une hausse de 40%, mais après avoir pris en considération les difficultés financières de l'Etat, elle a accepté les 20%, avec la ferme condition, toutefois, que les 70.000 travailleurs qui n'ont pas perçu leurs salaires depuis plus d'une année soient payés avant le mois de ramadan. 550.000 fonctionnaires des secteurs de l'éducation, de la santé, et de l'enseignement supérieur avaient bénéficié l'année dernière d'une augmentation conséquente de leurs indemnités lors d'une précédente bipartite. Les deux partenaires, par ailleurs, se sont mis d'accord sur le principe d'une augmentation du Salaire national minimum garanti (Snmg) fixé actuellement à 8000 DA. Cette hausse, qui atteindrait la somme de 10.000 dinars, interviendrait dès le mois d'octobre prochain lors d'une tripartite à laquelle prendront part, outre le gouvernement et l'Ugta, les organisations patronales déjà reçues par Ouyahia et sensibilisées sur la nécessité, tant économique que sociale, de revoir à la hausse le Snmg. Comment soigner le secteur de la santé... Dans le communiqué final sanctionnant les travaux de cette bipartite, le gouvernement a exprimé «son accord pour une révision (à la hausse) du Snmg». Ce principe se fera conformément à la loi «examinée avec la participation des représentants du patronat (public et privé).» L'Ugta a demandé, «face à la dégradation du pouvoir d'achat des travailleurs du fait notamment, des réformes et des mutations économiques que connaît le pays, la revalorisation du Snmg pour préserver ce pouvoir d'achat en tant que préoccupation sociale légitime et en tant que moyen économique pour relancer la demande et partant la production nationale», ajoute le communiqué. Le gouvernement et l'Ugta ont convenu, en outre, de l'examen et de la prise de décision pour chacune des propositions formulées par le groupe de travail pour l'adaptation du système de sécurité sociale, y compris les mutuelles, au nouvel ordre économique et social. L'on croit savoir, à ce propos, que des changements sont attendus à la tête de certaines mutuelles, dont la gestion laisse quelque peu à désirer. Il s'agit, notamment, de celle des Finances dont le responsable, également patron de la fédération Ugta des finances depuis plus de 10 ans sans mandat, ni bureau fédéral, a énormément fait parler de lui ces derniers temps, en mal bien entendu. En matière d'amélioration des performances de recouvrement, la bipartite marque sa totale adhésion aux recommandations formulées par le groupe de travail et qui portent notamment sur le renforcement des sanctions dans les cas de non-déclaration des salariés ou sous déclaration des salaires, la détermination d'une assiette de cotisation et des taux spécifiques au titre des salariés de certaines catégories d'activité ou professions (boulangers, cafetiers, artistes...) Et la dotation des organismes de sécurité sociale de moyens de renforcement de la fonction de contrôle. Ces recommandations portent également sur l'application des procédures et privilèges pour le règlement des créances détenues par la sécurité sociale sur les employeurs en cas de dissolution d'entreprises, le renforcement de l'entraide administrative entre les différentes institutions de l'Etat (fisc, registre de commerce, douanes, banques...) et le système national de sécurité sociale. En ce qui concerne l'adaptation des modalités de prise en charge des catégories particulières, le gouvernement a marqué sa volonté pour assurer la protection sociale de ces catégories d'assurés sociaux et sa disponibilité à couvrir les dépenses additionnelles induites par les prestations dont ils bénéficient. Dans ce cadre, un comité de suivi est chargé de l'approfondissement de cette question. L'épineux dossier de la réforme de la santé, à la lumière d'une dégradation jamais atteinte auparavant, a lui aussi été abordé dans le cadre des 9 dossiers épuisés lors de cette rencontre non-stop de pas moins de 16 heures. «Le gouvernement considère que la contractualisation est à même de régler ce problème épineux du financement du système de santé publique. Cet objectif doit être réalisé progressivement par la réunion des conditions de sa mise en oeuvre et par la conjonction des efforts entre les partenaires sociaux. Parallèlement, une invitation a été lancée à l'Ugta aux fins de s'associer au dialogue sur la réforme hospitalière qui contribuera à améliorer les prestations de la santé publique et à rationaliser les coûts», est-il noté dans le communiqué commun. Pour ce qui est du remboursement du médicament, le gouvernement «partage totalement les préoccupations exprimées par l'Ugta quant à cet important dossier et fait part de sa mobilisation pour réunir les conditions de réussite des actions induites pour lesquelles la contribution de l'Ugta est attendue». En ce qui concerne les mutuelles, le gouvernement a insisté sur leur rôle en tant «qu'élément complémentaire du système de sécurité sociale et de solidarité nationale au profit des salariés». Le gouvernement et l'Ugta ont décidé d'ouvrir un chantier bilatéral pour approfondir la concertation et contribuer à améliorer les conditions de fonctionnement de ces mutuelles dans le sens d'une meilleure efficacité au profit de leurs adhérents et ayants droit. Par ailleurs, les deux parties ont décidé de créer un groupe de travail bipartite chargé d'examiner tous les aspects du dossier retraite et de formuler les recommandations nécessaires accompagnées d'un programme d'action. 11.500 logements supplémentaires pour les travailleurs Dans le même temps, la réunion de la bipartite regroupant le gouvernement et l'Ugta a retenu un programme de 11.500 logements au profit des travailleurs salariés. Les deux parties ont souligné que le montage financier pour ce programme est constitué d'une aide de l'Etat non remboursable de 400.000 à 500.000 DA attribués par le Fonds national d'aide au logement (Fonal). Ce montage comprend également une contribution du Fonds national de péréquation des oeuvres sociales (Fnpos) sous deux formes (une aide non remboursable de 150.000 DA à 250.000 DA et un prêt sans intérêts qui peut atteindre 500.000 DA remboursable sur une durée de 10 ans) ainsi qu'un apport personnel du travailleur de l'ordre de 20% du coût du logement libérable en 2 tranches. Les assiettes foncières devant recevoir ces programmes bénéficieront d'un abattement de 80% de leur valeur vénale, tel que pratiqué pour les programmes de logements sociaux participatifs. Le pilotage de l'opération est confié au Fnpos avec le soutien technique du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme et la maîtrise d'ouvrage déléguée des Opgi. Quant à la distribution de ces logements, elle sera assurée par des commissions de wilaya. La Centrale, qui a tenu à débattre des orientations économiques en cours, se targuant de s'exprimer au nom de pas moins de 4 millions de travailleurs, a obtenu de nouvelles garanties concernant la manière dont seront menées désormais les réformes. La bipartite, en effet, a adopté plusieurs mesures susceptibles de consolider et de valoriser l'outil public économique. Il s'agit de mesures que le gouvernement a prises ou qu'il envisage de prendre dans le cadre de la prochaine loi de finances en attendant «l'aboutissement d'une stratégie globale souhaitée par l'Ugta», précise le communiqué final de la rencontre. Parmi ces mesures figurent l'octroi d'un avantage de 15% à l'outil national dans le cadre des marchés publics, le recours à des mesures d'allègement des contraintes financières pour les entreprises publiques disposant de plans de charge évidents et de qualité compétitives. Ces mesures, selon le communiqué, ont été déjà prises ces dernières semaines pour des entreprises du secteur de la construction pour un montant total de 14 milliards de DA. Un fonds budgétaire sera instauré dans la loi de finances 2004 pour faire face «rationnellement» à des cas similaires. Il s'agit également de l'instauration dans la loi de finances 2004 d'un dispositif financier de mise à niveau des entreprises nationales dont les entreprises publiques tireront avantage, la responsabilisation des SGP et des EPE dans le cadre de l'autonomie des entreprises, l'accès aux avantages du code d'investissements pour les entreprises publiques et privées procédant à des extensions d'activité et la recherche de partenariat avec un apport technologique et financier. «Toutes ces mesures et d'autres qui viendront, démontrent le souci du gouvernement de valoriser l'ensemble du potentiel économique et industriel national dans lequel l'outil public garde encore un plan négligeable», ajoute le communiqué.