Le n°1 et porte-parole du parti dissous attendra la fin de l'année pour dévoiler sa nouvelle stratégie. A partir de son exil à Kuala Lumpur en Malaisie, où il séjourne, officiellement pour raison de santé, Abassi Madani a lancé un projet de plan de concorde civile «qui pourrait contribuer à faire cesser le bain de sang» qui coule encore en Algérie. Cette initiative, dont on ne connaît pas encore tous les points, comporte «un appel strict» aux groupes armés «encore attachés à l'idéal islamiste» de faire cesser tout acte de violence ou de nature à porter préjudice à l'Etat ou aux citoyens. Cet appel que fera Abassi Madani aux groupes armés «pour un arrêt définitif des hostilités», nous a été confirmé par un des leaders du parti encore en Algérie. Selon notre source, le document qu'Abassi Madani concocte actuellement, avec la participation d'autres leaders auprès desquels, il avait ici, à Alger, récolté les doléances et les exigences, avant de partir en Malaisie, sera dévoilé dans quelques semaines, après avoir été remis aux principaux anciens responsables du parti dénous pour approbation. «Cela se fera avant le mois de décembre», ajoute notre source. Abassi Madani, qui a quitté le territoire algérien avec l'appui du Président de la République, semble, soudain, investi d'une mission: celle de pousser la mouvance islamiste radicale vers un soutien massif pour Bouteflika à quelques mois de l'élection présidentielle d'avril 2004. Pour Abdelaziz Bouteflika, comme pour Abassi Madani, le maître-mot dans ce «deal» est, encore une fois, la concorde civile et la réconciliation nationale. Si le premier en fait l'axe central de sa politique interne, le second en use pour séduire et faire un «retour pacifique» sur la scène politique légale. Cette volonté de revenir à la scène politique légale fait accepter à l'ex-FIS toutes les concessions inimaginables, quitte à appuyer ostensiblement le Président de la République et lui faire passer le périlleux écueil de la présidentielle de 2004. Toutefois, cette prétention de Abassi Madani devrait passer, elle aussi, et d'abord, pour un périlleux test: celui de démontrer qu'effectivement les leaders du FIS ont encore de l'ascendant sur les groupes armés. En fait, ce qui intéresse le plus la direction de l'ex-FIS c'est le Gspc de Hassan Hattab et rien d'autre. Les quatre autres organisations armées, le GIA, le GSC, le Gspd et le Ghds sont devenues des groupes «crépusculaires» appelés à disparaître. Le calme, précaire certes, qui règne sur l'axe Blida, Médéa, Chlef, jusqu'à l'Extrême Ouest (zones d'activité de ces quatre groupes) renseigne sur la désagrégation des structures armées de ces groupes et de leurs capacités de porter le danger dans les villes. Le Gspc reste, lui toujours, aussi fort et structuré. Le «coup d'éclat» porté dans le Sud algérien et l'affaire du rapt de trente-deux touristes européens ont démontré que le Gspc est l'organisation armée la plus hégémonique en Algérie. Les attentats ciblés et les incursions meurtrières portées en région kabyle et dans l'Est algérien ont été depuis le début de l'année particulièrement meurtriers. La crise pouvoir-archs aidant, le Gspc a fortifié ses fiefs kabyles et mène des raids meurtriers contre les militaires, les policiers, les GLD et les gardes-communaux. Si Abassi Madani réussit à convaincre la direction du Gspc à déposer les armes, il aura réussi un grand coup et pourra revenir à la vie politique par la grande porte. Il y a quelques mois, Mourad D'hina, depuis son exil, à Genève, a laissé entendre que pareille issue était envisageable et qu'il était prêt à entreprendre des consultations auprès des principaux chefs des groupes armés. Voilà donc, la grande trouvaille du moment, dans le camp des islamistes, en attendant d'autres.