Dans une sortie explosive, le numéro 1 de l'ex-FIS soutient le président tout en lançant un appel aux groupes terroristes. «Songer actuellement aux élections avant de trouver une solution à la crise c'est mépriser le peuple algérien». C'est ce qu'a déclaré, en substance, le numéro 1 et porte-parole du parti dissous, Abassi Madani, lors de son passage sur les ondes de la radio Assalam, vendredi, tard dans la nuit. Depuis son exil à Kuala Lampur, Cheikh Abassi Madani a fait appel aux différents groupes armés pour se joindre à la concorde civile initiée par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Avec cette sortie qui intervient à la veille de la célébration de la guerre de Libération nationale, Abassi joue officiellement la carte du président Bouteflika. Cette sortie, loin d'être la première, de la part d'un homme officiellement interdit de s'exprimer publiquement, est allée plus loin que toutes les autres, mettant à nu le conflit apparu entre Abassi et Benhadj depuis leur sortie de prison en juillet passé. Ne voulant désormais plus être le porte-parole du parti et évitant de préciser le nom de son successeur, il a insinué lors de cette rencontre «qu'il existe des personnes plus aptes que moi pour poursuivre la mission et je suis certain que mon frère Ali Benhadj partage mon avis». Curieusement, donc, Abassi, tout en donnant l'air d'être aux côtés de Benhadj, se garde bien de dénoncer le traitement dont il est l'objet, ni les interpellations policières dont il est victime assez régulièrement. Autant Abassi, soutenu par le président, a trouvé toute la latitude pour activer politiquement, autant Benhadj a été littéralement «enterré» politiquement. La divergence, concernant le règlement de la crise algérienne, risque fort de tourner à l'avantage de l'«enfant terrible de Kouba». Benhadj, estiment les observateurs, très au fait des milieux islamistes, est l'homme qui arrive encore à mobiliser ce qui reste de la direction et de l'électorat du FIS dissous. Les mêmes observateurs estiment que si Abassi multiplie les propos dithyrambiques à l'adresse du président, ce ne peut être gratuitement. Il doit sans aucun doute attendre quelque chose en échange. D'où sa sortie. Considérant le Front islamique du salut (FIS) comme une institution sacrée. Abassi Madani refuse que sa formation politique tombe sous la domination d'une minorité qui parlerait en son nom «le Front islamique du salut est un front universel, il n'existe pas uniquement comme étant un slogan, il appartient aussi au peuple algérien». a-t- il indiqué. Un appel du pied clair signifiant que Abassi ne désespère toujours pas de voir le FIS-dissous revenir légalement sur la scène politique nationale à l'ombre d'un second mandat de Bouteflika. Ce dernier, qui semble privilégier le partage du travail, y compris en politique, ne reste pas non plus les bras croisés. Après sa virée fortement controversée à Kuala Lumpur, voilà qu'il compte se rendre à Jijel, bastion de l'AIS, bras armé de l'ex-FIS. Une sortie pouvant revêtir nombre de connotations politiques, et soulever moult controverses. Déplorant la situation qui prévaut en kabylie, le numéro un du parti-dissous affirme que cette crise est un acte voulu par le pouvoir. «Alors que jadis le peuple kabyle constituait une population soudée, aujourd'hui, il se trouve divisé. L'objectif est de bloquer toute issue pour créer d'autres crises jusqu'au pourrissement de la situation. Et d'ajouter «La diversité culturelle dans un état musulman est une spécifité courante connue dans l'histoire, parler plusieurs langues n'a jamais posé de problème, nous pouvons parler en langue kabyle, en tergui sans se passer toutefois de la langue du coran». Pour sortir de cette crise qui gangrène le pays, Abassi El Madani estime que la décision dépend de la volonté du peuple algérien «autrefois la crise a été maîtrisée par le pouvoir, aujourd'hui, c'est l'impasse. La seule victime dans cette affaire c'est le front islamique, nous avons déjà perdu beaucoup de temps et de sang pour cela, le peuple algérien doit impérativement se mobiliser» a-t-il martelé. Interrogé s'il ne s'agit pas d'une simple combine voir une couverture pour que le N° 1 du parti dissous apporte son soutien à Bouteflika à quelques mois de l'élection présidentielle 2004, le porte-parole estime que «songer actuellement aux élections avant de trouver une solution à la crise, c'est mépriser le peuple algérien». Et d'enchaîner: «Laissons de côté la langue de bois, la légitimité et la transparence sont les seules choses sur lesquelles nous devons miser».