Bouteflika, Taleb, Hamrouche, Benflis et Djaballah ont des chances équivalentes, ou presque, dans la course à la magistrature suprême. Des sources dignes de foi indiquent que les chancelleries internationales les plus importantes, telles que celles de Paris et Washington, «suivent avec un intérêt accru le développement des évènements en Algérie». Cela, au moment où l'Algérie vient, une fois de plus, d'être «épinglée» par l'ONG Amnesty International en matière de non-respect des droits de l'homme. Le rapport, il est vrai, s'appesantit sur les «bonnes intentions» de nos décideurs, rarement suivies d'actes. Parce qu'il ne concerne que l'année précédente, il ne revient pas sur les graves dérives que vit actuellement le pays. Entendre par là le harcèlement déclenché contre certains titres de la presse privée nationale, la manière «cavalière» dont ont été traités les enseignants venus émettre de simples revendications sociales, les provocations incessantes contre les délégués du mouvement des archs au point où ce dernier vient de décréter le report du dialogue jusqu'après la présidentielle d'avril 2004, l'absence de prise en charge des sinistrés du séisme...La situation est tout simplement explosive, estiment des analystes qui s'étonnent que «des responsables, à différents niveaux de l'Etat, s'évertuent à jeter de l'huile sur le feu». Entendre par là, notamment, les interpellations devenues systématiques de toute voix discordante, mais aussi le mépris clairement affiché par rapport à un nombre effrayant de revendications pourtant qualifiées de «légitimes» par tous. Comment qualifier, les intimidations sans nom dont sont quotidiennement victimes des journalistes, mais aussi l'agression policière que vient de subir Abrika et qui a fait annoncer aux archs le report du dialogue jusqu'à après avril 2004. C'est un véritable carton rouge que ces derniers viennent d'adresser au président à cause des agissements de certains membres de son entourage immédiat. En outre, nous apprenons de sources dignes de foi, qu'aussi bien la Maison-Blanche que l'Elysée suivent avec une extrême attention tout ce qui se passe en Algérie durant ces derniers mois. Au moment où le conflit au sein du FLN atteint des proportions telles qu'elles dépassent de loin le simple cadre partisan, ces chancelleries en suivent d'autant plus près le bras de fer qui oppose ouvertement le président Bouteflika à son ancien chef de gouvernement et actuel secrétaire général de l'ex-parti unique. Ali Benflis, lors de sa visite en France, avait été reçu avec «les égards dus à un chef d'Etat». La France, qui voit d'un mauvais oeil les rapprochements entre Alger et Washington, aspire à la stabilité politique de notre pays, qui ne peut qu'amener de meilleurs équilibres économiques et des affaires plus sûres et plus lucratives. Le projet de mise en place d'une station d'écoutes de la NSA dans le Sud algérien a lui aussi de quoi déranger Paris et provoquer un plus grand rapprochement entre l'Elysée et les plus sérieux adversaires de Bouteflika. Ce dernier a beau jouir du soutien de certaines capitales occidentales, force est de souligner que celles-ci ne vont quand même pas voter, ni obliger le peuple à votre pour lui. Mieux, l'armée n'a guère attendu de rappels à l'ordre pour annoncer publiquement son retrait officiel de la scène politique. Dans un entretien accordé au journal égyptien Al-Ahram, le chef d'état-major, Mohamed Lamari, avait clairement signifié que l'armée ne s'opposerait pas à l'arrivée au sommet de l'Etat d'un candidat islamiste, quand bien même ce serait Abdallah Djaballah. Selon toutes les appréciations et estimations, il est devenu certain qu'un deuxième tour aura bel et bien lieu. Mieux, beaucoup d'analystes pensent que «c'est Ahmed Taleb Ibrahimi qui se retrouvera à ce deuxième tour». Longtemps qualifié d'islamiste par ses adversaires politiques, cet homme a toutes les chances de profiter du conflit qui oppose Bouteflika à Benflis. Sa ligne, celle du mouvement Wafa, se veut être le creuset des lignes nationalistes et islamistes algériennes. L'homme, qui a prouvé sa grande popularité auprès des masses, peut ratisser large aussi bien dans les rangs déchirés du FLN que dans la base de l'ex-FIS. Il peut bien être le outsider que tous les observateurs guettent. Face à Taleb, le choix demeure aussi incertain que varié entre Bouteflika, Benflis, Djaballah et même Hamrouche. Les jeux sont loin d'être faits même si rien ne va plus...