Subitement, on se souvient de ces millions de personnes qui souffrent quotidiennement en silence. Oublié, méprisé, délaissé... des années durant, le citoyen fait tout d?un coup son retour dans les discours des candidats à l?élection présidentielle. Un retour bien évidemment circonstanciel. Car, sans l?échéance électorale du printemps prochain, on imagine mal «le petit peuple» faire l?objet d?un tel intérêt. Subitement donc, on s?est souvenu de ces millions de personnes qui souffrent quotidiennement en silence. Des millions de personnes auxquelles tous les candidats ayant, jusque-là, affiché leur intention de prendre part à la course à la magistrature suprême du pays, promettent monts et merveilles. Au préalable, ces mêmes candidats n?omettent pas de verser quelques larmes de crocodile comme pour dire combien ils compatissent à la douleur des petites gens. A vrai dire, ce ne sont pas tant ces petites gens qui intéressent les prétendants à la magistrature suprême du pays, mais plutôt leurs voix. Entre Abdelaziz Bouteflika, le président de la République, par ailleurs candidat à sa propre succession, qui regrettait, il y a quelques jours, à l?occasion de l?ouverture de l?année judiciaire, «la longue attente des citoyens pour le jugement de leurs affaires» et promettait d?accorder «une attention particulière au traitement des justiciables au niveau des instances judiciaires» ; Taleb Ibrahimi qui déplore à chacune de ses sorties les conditions de vie des Algériens non sans faire la promesse de les améliorer ; Mohammed Hadef, président du Mouvement national d?espérance, qui dit n?avoir d?yeux que pour la population de l?«Algérie profonde» ; Moussa Touati, président du Front national algérien, qui fait de la «prise en charge des préoccupations des citoyens» son cheval de bataille ; Ali Benflis, dont le projet «moderniste» a pour but de «réconcilier les Algériens» et de «rendre la dignité aux citoyens» ; Ahmed Benbitour, ex-Chef du gouvernement, que le «désespoir de la jeunesse et des marginalisés» chagrine ; le général Rachid Benyellès qui s?engage à tout faire pour «répondre à l?attente légitime des Algériens qui demandent à vivre en paix dans un Etat de droit, avec la possibilité d?avoir un emploi, un toit, des soins médicaux?» ; Mouloud Hamrouche qui parle de la «détresse de nos concitoyens», il faut noter qu?aucun candidat, (ou potentiel candidat) ne se dit insensible à ce qu?endurent les «Algériens d?en bas» quotidiennement. Mais ce subit intérêt pour le citoyen a-t-il des chances de se prolonger au-delà de la prochaine présidentielle ? A-t-il des chances de se traduire sur le terrain par une série de mesures à même de soulager un tant soit peu les souffrances, les privations et la misère des citoyens ? Beaucoup ne se posent même pas ces questions, tant ils sont convaincus que les discours électoraux restent ce qu?ils sont : des discours circonstanciels. Sans lendemain. Des promesses qui sont faites pour ne pas être tenues.