Avec l'alignement d'Ennahda, c'est le pôle modéré de l'islamisme algérien qui prend option pour le chef de l'Etat. Après des années d'hibernation, le parti Ennahda revient au devant de la scène à travers son troisième congrès qui consacre une orientation pro-présidentielle, et ce, à la lecture de la déclaration faite par son nouveau secrétaire général, Fethi Rebaï. En effet, en s'inscrivant dans un perspective d'«opposition constructive», ce parti islamiste, qui renaît de ses cendres, ne fait ni plus ni moins que prêter allégeance au Président de la République en lui assurant «un soutien critique». La sortie de la plus ancienne, mais néanmoins la plus petite formation islamiste du paysage politique national, intervient quelques jours après l'autre sortie très médiatisée du leader de l'ex-FIS, Abassi Madani, qui, à partir de Kuala Lampur en Malaisie, n'a pas manqué de faire des appels du pied au chef de l'Etat. Une attitude que de nombreux observateurs interprétent comme une offre de service de la part du n°1 du parti dissous. Abassi Madani n'a fait, en fait, qu'emboîter le pas à Aboudjera Soltani, le nouveau président du MSP, qui, dans un entretien accordé à la radio nationale, a dressé un tableau plutôt positif du chef de l'Etat. Le chef de fil de l'islamisme modéré a même trouvé des circonstances atténuantes à Bouteflika pour certains dossiers. Avec l'alignement d'Ennahda, on peut affirmer, sans trop de risques de se tromper, que le pôle modéré de l'islamisme algérien a pris option pour le Président de la République. Cette mouvance est vraisemblablement rejointe par une aile de l'intégrisme dur, en l'occurrence les militants acquis à Abassi Madani. Ces deux forces politiques, apparemment antagoniques, semblent faire cause commune. Cette nouvelle donne permet au chef de l'Etat de s'assurer un réservoir électoral non négligeable et fissure le camp islamiste, rongé, lui aussi, par les luttes de leadership. En effet, il semble que dans cette famille politique, la situation n'est pas reluisante. Pour preuve, le président du MRN, candidat déjà déclaré, n'a pas réussi à fédérer les partis de la mouvance autour de sa candidature. Espérant rallier l'électorat de l'ex-FIS à sa cause, en décrochant des flèches empoisonnées à son rival direct, Ahmed Taleb Ibrahimi, il se voit quelque peu déstabilisé par la nouvelle position adoptée par Abassi Madani qui, à travers ses déclarations, provoque une véritable fissure dans l'édifice du parti dissous. Cela dit, il est clair que les deux hommes les plus populaires de la mouvance islamiste, Djaballah et Ibrahimi, conservent toute leur chance auprès des électeurs, dans la mesure où Ennahda, comme le MSP, donne la nette impression d'être en recul sur l'échiquier politique national. Il n'empêche qu'ils doivent composer avec un autre candidat décidé à puiser dans leur réservoir électoral.