Il ne fait pas bon vivre en France quand on est basané Deux rapports ont épinglé l'Hexagone en matière de traitement réservé aux immigrés alors qu'un troisième relève ce type de phénomène à travers toute l'Europe. S'il y a un paradoxe que cultive la République française c'est bien celui d'avoir été élevée au rang de «Patrie des droits de l'homme» et de se faire épingler par les organisations de défense des droits de l'homme. A ce titre, deux rapports ont pointé du doigt l'Hexagone en matière de traitement réservé aux immigrés alors qu'un troisième relève ce type de phénomène à travers toute l'Europe. Tout cela en l'espace de moins d'une semaine. La recrudescence des actes de racisme se retrouve exacerbée, notamment, en période de campagne électorale. Les partis (l'UMP pour la majorité au gouvernement et le Front national pour l'extrême droite) se disputent un réservoir de voix sensible aux thèses ultra-nationalistes et xénophobes et font monter les «enchères» pour le capter. Les immigrés, maghrébins et africains noirs essentiellement, en font les frais. S'il y a un pays où il ne fait pas bon vivre lorsque l'on est basané, c'est bien la France, surtout si de surcroît l'on est étranger. «Des preuves statistiques et des récits indiquent que les jeunes Noirs et Arabes vivant dans des quartiers économiquement défavorisés sont tout particulièrement et fréquemment la cible de ce type de contrôle, semblant indiquer que la police se livre à un profilage ethnique», peut-on lire dans un récent rapport publié par l'Organisation non gouvernementale Human Rights Watch. HRW s'est basée sur une étude conjointe de l'Open Society Justice Initiative (Osji), une émanation de la Fondation Soros, et le Cnrs, réalisée entre 2007 et 2008 pour appuyer un tel constat. Les probabilités de contrôle sont «six fois plus élevées pour les Noirs et près de huit fois plus pour les Arabes...Les policiers ont des préjugés. C'est sur la couleur de la peau, mais surtout les habits», écrivent les rédacteurs du rapport qui citent le témoignage d'un jeune immigré interviewé dans le cadre de cette étude. Dans un ouvrage intitulé «Migrations. Etat des lieux», présenté le 24 janvier à la presse, à Paris, la Cimade (Association de défense des populations immigrées, Ndlr) met en exergue la politique sécuritaire menée par la France entre 2009 et 2011. «Depuis 2009, les responsables politiques français et les médias ont multiplié et légitimé les discours ouvertement xénophobes. Port de la burqa, identité nationale, déchéance de la nationalité, chasse aux Roms, (débat sur la laïcité, Ndlr). Ces deux dernières années ont été marquées par une succession de polémiques qui ont largement contribué à stigmatiser les étrangers comme les Français d'origine étrangère», a souligné Gérard Sadik, chargé des politiques migratoires à la Cimade. Jeudi dernier, c'était au tour de la Cour européenne des droits de l'homme (Cedh) d'épingler la France pour un cas de traitement «prioritaire» des demandes d'asile, une procédure dénoncée par plusieurs ONG et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (Unhcr). «La juridiction du Conseil de l'Europe a condamné la France pour violation du droit à une procédure équitable dans un dossier concernant un Soudanais de 36 ans qui n'avait disposé que de cinq jours pour formuler sa demande d'asile en France, au lieu de 20 selon la procédure normale», a rapporté une dépêche de l'APS datée du 2 février 2012. Racisme, xénophobie... Ces réactions hostiles envers les migrants qui montent en puissance particulièrement en période de crise économique ne sont pourtant pas une particularité française. Elles s'étendent à toute l'Europe. «La xénophobie, le racisme (...) progressent dans de nombreux pays européens en ce moment, avec des effets négatifs, non seulement sur les migrants, mais aussi sur les Roms et les autres minorités nationales», a déclaré le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Thomas Hammarberg, à Vienne. Comment contrer un tel phénomène? «Une couverture médiatique plus diversifiée et l'enseignement de la tolérance à l'école pourraient aider à ralentir cette tendance», a préconisé M.Hammarberg à l'occasion d'une allocution prononcée dans le cadre de la sécurité et la coopération en Europe. Mieux vaut tard que jamais...