Le Conseil de sécurité qui s'est réuni, lundi en urgence, à la demande de Damas, n'a pas statué sur l'agression israélienne. Encore une fois, le Conseil de sécurité des Nations unies s'est trouvé désarmé et en porte-à-faux devant les actions d'Israël mettant en danger la sécurité et la stabilité du Proche-Orient. Faut-il cependant s'en étonner lorsque, peu avant la réunion du Conseil de sécurité - dont les Etats-Unis assurent la présidence tournante pour le mois d'octobre - le président Bush a rendu compte d'une conversation téléphonique qu'il avait eu avec le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, l'assurant du soutien de Washington et affirmant «J'ai souligné clairement au Premier ministre (Ariel Sharon), comme je l'ai toujours fait, qu'Israël a le droit de se défendre». M.Bush indique par ailleurs «Israël ne doit pas se sentir entravé pour ce qui est de défendre la patrie». Ainsi quoi qu'il fasse contre la sécurité et la paix dans la région du Proche-Orient l'Etat hébreu n'a pas de compte à rendre à la communauté internationale, G.W.Bush ajoutant toutefois, «Mais l'Etat hébreu doit éviter l'escalade et de créer de nouvelles tensions». Certes, mais le fait patent est là: les Etats-Unis continueront à protéger Israël quels que soient ses actions et les dangers qu'il fait courir à la paix. Et de fait, l'ambassadeur des Etats-Unis à l'ONU, John Negroponte, qui assure la présidence du Conseil de sécurité, a vite fait de mener la plainte syrienne dans une voie sans issue en déclarant dès l'abord que le Conseil de sécurité «n'avait pas prévu de se saisir du projet de résolution», présenté par la Syrie. Damas demandait par ailleurs qu' «Une déclaration sans équivoque condamnant à l'unanimité l'agression israélienne serait utile et nécessaire». Toutefois, après que le représentant des Etats-Unis eut brandi la menace d'opposer le veto à toute résolution condamnant ou demandant la condamnation d'Israël, suite à son raid contre la Syrie, il était dès lors évident qu'il était peu probable que la plainte syrienne aille plus loin. D'ailleurs, les quinze membres du Conseil de sécurité ont débattu, lundi, de la question sans cependant statuer sur la plainte syrienne la renvoyant sine die. Ainsi, John Negroponte, a indiqué qu'«aucune action spécifique (sur le projet syrien de résolution) n'a été mise au calendrier». Et comme c'est le président du Conseil de sécurité, -présidence assurée pour le mois courant par les Etats-Unis-, qui agence le calendrier du Conseil, il était patent que le projet syrien n'avait aucune chance d'y figurer. Ce que confirme l'ambassadeur allemand à l'ONU qui indique pour sa part «Nous allons devoir attendre les prochains jours pour voir ce qui va se passer». Contrairement à ce que pensait ou espérait Damas, il n'y eut point de test pour l'ONU, ce lundi, les faits s'étant joués à l'avance, les Etats-Unis ayant bétonné toutes les issues ne laissant aucune alternative à l'ONU d'assumer ses prérogatives dans cet épisode d'agression clairement établie contre un Etat souverain, la Syrie, par l'un des membres de l'ONU, Israël. En réalité il aura surtout été confirmé la paralysie de l'ONU dès qu'il est question des actions criminelles d'Israël dans les territoires palestiniens ou contre ses voisins arabes. La déclaration du président Bush, apportant son soutien à Israël, sans équivoque, enlève toute illusion quant à la neutralité de Washington dans le conflit israélo-arabe, alors qu'il était attendu, a tout le moins, des Etats-Unis qu'ils fassent preuve d'un peu plus d'équilibre, dans leur appréciation de la situation proche-orientale, en tant que l'un des parrains du processus de paix. Ce déséquilibre dans la prise en charge du dossier proche-oriental apparaît clairement lorsque l'ambassadeur américain à l'ONU, contournant les responsabilités d'Israël dans les tensions qui minent le Proche-Orient, estime qu'une «nouvelle résolution sur le Proche-Orient n'était pas nécessaire. Ce qui est nécessaire c'est que la Syrie démantèle les terroristes se trouvant à l'intérieur de ses frontières». Washington reprend ainsi, sans autre précaution, les assertions d'Israël. Pratiquement, les Etats-Unis encouragent ainsi le s d'Israël, faisant même par là, comprendre aux Arabes qu'ils n'avaient, ou n'auraient, d'autres choix que de s'incliner devant le diktat d'Israël. La preuve en a été administrée au Conseil de sécurité lorsque l'agresseur devient victime et l'agressé bourreau. L'ONU qui a été mise dans l'incapacité - de s'opposer à la guerre programmée par les Etats-Unis contre l'Irak, vient à nouveau de montrer qu'elle n'est plus qu'une chambre d'enregistrement à la solde de la superpuissance mondiale qui y fait la loi. Peut-il en être autrement lorsque l'on constate qu'Israël dispose à l'ONU d'un statut particulier qui le met au dessus des lois internationales et auquel les articles de la Charte de l'ONU ne s'appliquent pas? En vérité, en ne statuant pas sur la plainte de Damas, la renvoyant à une date ultérieure, ce n'est pas la Syrie, en fait, qui est ainsi remise à ses justes proportions, mais bien tout le monde arabe qui se trouve de la sorte mortifié par la reculade de l'ONU mise dans l'impuissance de condamner une énième agression d'Israël contre un pays arabe.