La permanence de Amar Ghoul Jeunesse et motivation, tels sont donc les secrets de la réussite de ces partis et alliances qui ont participé au Printemps algérien. Les coulisses de la campagne! Qui n'a pas rêvé de savoir ce qui se cache derrière les élections? Que s'est-il passé aux QG de campagne du FLN, de l'Alliance pour l'Algérie verte et le RND. Jeudi 10 mai, au niveau de l'Alliance verte, il est 8h du matin. «Rendez-vous à la permanence du candidat Amar Ghoul, on va le voir voter et après je vous emmène au siège du MSP pour vous ouvrir les portes 'secrètes''...», nous dit-on. Sur place, nous trouvons la jeune équipe de campagne en train de s'activer pour les derniers préparatifs. «C'est le grand jour. Nous sommes en train de poursuivre notre bataille du Net pour mener à bon port notre candidat», assurent les soldats du «Ghoul». Après cette brève halte direction Bouchaoui, plus exactement à l'école primaire Mohamed-Oroua où sont rattachés la plupart des ministres du gouvernement. Midi, le candidat-ministre arrive au volant de sa voiture. On lui ouvre le portail du centre. En candidat «normal», comme François Hollande en France, Amar Ghoul se gare comme tous les citoyens à l'extérieur. Dès son entrée à l'intérieur du centre de vote, les youyous venant de vieilles femmes assises devant le centre, commencent à retentir de partout. Les «Tahia Si Amar, Tahia Si Amar», étaient également de la partie. Tout comme les «Chaâb maâk ya Amar» que scandaient des jeunes qui semblaient être subjugués par le candidat. Amar Ghoul prend donc la direction du bureau 72 pour accomplir son devoir électoral. La même liesse est présente dans le bureau. A sa sortie, il se dirige vers les vieilles femmes qui l'acclamaient. «El Hadjate, adoûna (priez pour notre victoire)», leur lance Amar Ghoul avant de reprendre le volant de sa voiture. L'Alliance travaille à l'américaine C'est le moment d'aller dans l'antichambre des élections. Première étape, le siège du MSP à El Mouradia qui est le QG de l'Alliance verte. Sur place la première chose qui interpelle est le professionnalisme du comité de campagne. «C'est une campagne à l'américaine que mène l'Alliance verte», fait comme constat un journaliste tunisien rencontré sur place. Il est vrai que l'Alliance n'a pas lésiné sur les moyens, à commencer par la section Internet qui a mené et gagné la bataille de la Toile. «Le secret de notre réussite est le fait que nous ayons formé, il y a plus d'un an, 12.000 jeunes à la propagande électorale sur le Net». Abdelkader Benkhaled, ingénieur en informatique, dirige cette cellule. Abdelkader, qui nous a ouvert les portes de son royaume, explique que l'Alliance s'est basée sur les TIC pour toucher le maximum de personnes. «Juste sur Facebook, nous avons réussi à toucher plus de 2 millions 300 internautes», rapporte-t-il. Finie la visite du «QG virtuel», place à la salle des opérations. «Cette salle est l'âme de la journée électorale», rapporte Sid Ahmed Boulil, ancien ministre des Transports, lequel s'occupait de la gestion de cette salle. «C'est elle qui va nous permettre de suivre le déroulement du scrutin, minute par minute, et cela à travers tout le territoire national», nous explique-t-il. «Mais l'avantage de cette cellule, c'est qu'elle nous permettra d'avoir une idée sur la tendance des résultats avant leur proclamation par le ministère de l'Intérieur», souligne-t-il. Tout comme la campagne, la salle d'opération est à l'américaine. «Un open-space» qui a un petit air de New York Stock Exchange! «Les casquettes et gilets des jeunes militants qui animent cette cellule, leur donnent un air de traders. Casquette blanche, gilet blanc pour les responsables et casquette verte, gilet vert pour les opérateurs», explique M.Boulil, avant d'être soudainement interrompu par un des militants. «On a fini par calculer les premiers taux qui sont plus ou moins positifs», lui chuchote ce militant. La joie gagne alors toute l'équipe qui est juste après conviée à prendre sa pause-déjeuner. Un déjeuner avec Bouguerra L'Alliance pour l'Algérie verte refuse de laisser partir ses invités sans avoir déjeuné. «Attendez! ne partez pas! vous allez déjeuner avec nous et profiter pour parler au cheikh Bouguerra Soltani», insiste-t-on. «Prenez place dans la salle d'attente», nous invite-t-on. Cinq minutes plus tard, un jeune militant vient nous appeler pour le déjeuner. «Désolé, on commence par les femmes. Elles mangent toutes seules, après c'est au tour des hommes», s'excuse-t-il. Le MSP ne fait donc pas dans la mixité! Néanmoins, ce moment d'attente a été bénéfique pour nous. Il nous a permis d'intercepter une discussion de couloir entre membres du parti. Ces derniers étaient en train de pronostiquer le nombre de sièges que l'Alliance allait obtenir et comment les quotas réservés aux femmes devaient être comptabilisés. Une preuve qu'on était confiant chez les «Verts». Il est 14h20, c'est au tour des hommes de déjeuner. On nous convie à prendre place à un déjeuner avec Bouguerra dans la salle de prières du parti. «Vérifiez leurs doigts, celui qui n'a pas voté ne mange pas», lance avec humour le secrétaire général du MSP avant de souhaiter bon appétit à tout le monde. On prend le déjeuner sur un tapis. Bouguerra Soltani invite les journalistes présents à une conférence de presse improvisée. Direction Hydra au siège du vieux parti, le FLN. «Où est la salle des opérations du FLN?», demande-t-on à un jeune, assis à l'entrée du siège. «Salle des opérations? Laquelle, celle du coeur? Après la large victoire que nous pensons obtenir ce soir, certains dissidents du FLN auront besoin de salles d'opération et de réanimation...», nous répond-il avec humour avant de nous dire de monter à l'étage. Ambiance bon enfant au FLN L'ambiance était au beau fixe dans cette salle de réunion où le moral des jeunes militants était «remonté» au même niveau que le taux de participation. Rien donc de «croustillant» à se mettre sous la dent dans cette salle d'opération. Direction alors la salle de réunion où «se trouve la véritable ambiance», indique un militant. La salle de réunion était effectivement en effervescence. Vieux et jeunes militants étaient rassemblés dans cette salle. L'ambiance était bon enfant. Elle présentait un petit air festif. Certains candidats étaient même en train d'enregistrer des vidéos qui allaient être diffusées dans les minutes qui suivraient sur le Net, «cela afin d'insister auprès des indécis pour voter pour le parti du nationalisme», affirme Mme Bendaïka Nassima, qui venait de finir son enregistrement. Et à voir les têtes jeunes et angéliques des candidats que le FLN était en train de filmer, on comprend vite que le vieux parti veut se débarrasser de son étiquette de parti des «vieux». «Ça nous change des vieux du parti. Regardez! même les têtes de ces dames inspirent confiance», commente une journaliste. Mme Bendaïka avoue être confiante quant à une large victoire du FLN. «Je sens au fond de moi-même qu'on va gagner très largement», pronostique-t-elle. «J'ai constaté, lors des sorties que nous avions faites sur le terrain, pendant la campagne électorale, que les jeunes croient encore aux valeurs que dégage le parti», dit-elle. Le même constat est fait par Madame Bentorki Oum El Saâd qui dit que «la jeunesse algérienne croit en les valeurs de la Révolution. C'est pour cela qu'elle placera le FLN au sommet». Avant de quitter le siège du FLN, nous nous faufilons dans les couloires dans l'espoir de dénicher une info croustillante. Et nous n'allons pas être déçus par notre irruption dans les couloirs du vieux parti. Un membre du comité central, qui parlait au téléphone prédisait un fort taux de participation et une victoire record du FLN. «Je suis sûr que nous allons gagner. Le Bon Dieu fera tout pour que l'on gagne et ainsi prouver aux observateurs européens que 50 ans après, le peuple fait toujours confiance au parti qui a chassé le colonialisme», dit-il par téléphone. Une prédiction qui s'avérait être tout à fait juste... C'était donc sur un air prémonitoire que nous laissons le FLN pour prendre la direction de Ben Aknoun au siège du RND. On la joue relaxe au RND Le siège était pratiquement désert. Mis à part quelques militants rassemblés dans la salle des opérations. C'était le vide total au parti de Ahmed Ouyahia. Point de candidats à l'horizon. Quelles sont les raisons? Un excès de confiance? Nassim Sidi Saïd, pilote automobile, militant du parti explique que «les candidats sont sur le terrain». En tout cas, malgré une équipe des opérations réduite, les jeunes militants du RND étaient en train d'effectuer un travail titanesque. Ils s'activaient en recevant les derniers résultats communiqués par leurs chefs de bureau, qu'ils inscrivaient sur des tableaux. Tout comme l'équipe qui s'occupait de la campagne électronique qui mettait en ligne les estimations. Le seul fait marquant était le silence qui gagnait la salle toutes les deux heures, au moment où le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, annonçait les taux de participation. Ce silence était suivi juste après par des cris de joie. «Le peuple a prouvé qu'il était prêt à prendre son avenir en main», nous dit un jeune militant tout heureux. «Même si on ne gagne pas, la forte participation coupera l'appétit de l'Otan...», lance-t-il. En tout cas, les militants du RND qui se la jouaient relax étaient confiants quant à l'obtention d'une des trois premières places au niveau de l'APN. Jeunesse et motivation, telles sont donc les secrets de la réussite de ces trois grands partis qui ont participé au Printemps algérien. Il est 20h, tous les bureaux de vote ont fermé. Nous quittons le QG du RND.