Le président intérimaire malien, Dioncounda Traoré a été agressé lundi dans son bureau par des manifestants Dioncounda Traoré devait prendre hier les rênes de la transition dans un pays profondément divisé, au lendemain de son agression par des manifestants opposés à son maintien au pouvoir. Cette agression de M.Traoré dans son bureau à Bamako au lendemain d'un accord prévoyant qu'il dirige la transition pour un an qui risque de compliquer la tâche immense qui l'attend, a été unanimement condamnée à l'étranger et au Mali, y compris par l'ex-junte militaire au pouvoir qui s'était opposée à lui, et a soulevé la question de la sécurité du chef de l'Etat. Le Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la République (FDR, opposé au coup d'Etat ayant renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré), s'étonne ainsi «que des mesures de sécurité appropriées n'aient pas été prises pour protéger le palais présidentiel et le président de la République devant l'avancée des manifestants hostiles». Les manifestants ont réussi à briser une grille du complexe présidentiel de Koulouba, malgré la présence d'une centaine de gardes nationaux, mais surtout, plusieurs d'entre eux sont parvenus à accéder au bureau du chef de l'Etat qu'ils ont frappé suffisamment fort pour qu'il soit hospitalisé plusieurs heures. Les soldats ont vainement tenté à certains endroits d'empêcher le passage des manifestants, dont l'un a été grièvement blessé et six plus légèrement, indique-t-on de source hospitalière. Les examens médicaux de M.Traoré, blessé au visage et au dos, n'ont révélé aucune lésion grave et, selon un membre de sa famille, «il marche seul, est en possession de toutes ses facultés, mais est un peu fatigué». Agé de 70 ans, Dioncounda Traoré, n'a pas parlé depuis cette agression, mais, malgré le traumatisme subi, il a l'intention d'assumer ses fonctions de président de transition pendant 12 mois, conformément à l'accord qu'il a signé dimanche avec les dirigeants de l'ex-junte et les médiateurs d'Afrique de l'Ouest. Un accord en partie obtenu en échange du statut d'ex-président donné au chef des auteurs du coup d'Etat, le capitaine Amadou Haya Sanogo, dont les hommes restent omniprésents à Bamako et qui se serait bien vu lui-même à la tête de la transition. «Démissionner actuellement, ce serait faire le jeu de ceux qui n'aiment pas le Mali», a déclaré un des conseillers de M.Traoré. Son Premier ministre, Cheick Modibo Diarra, a appelé au calme, surtout les jeunes auxquels il a demandé de «mettre fin aux marches» dans les rues de Bamako. Le FDR a estimé que l'agression «est l'aboutissement de la campagne de haine et d'apologie du crime entretenue depuis plusieurs semaines sur un certain nombre des radios FM privées et par des acteurs de la scène politique et de la société civile». Le parti de M.Traoré, l'Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma), a estimé que son agression «met gravement en cause les services de sécurité de l'Etat maliens et certains responsables, tant politiques que de la société civile». Il parle de «complicité» entre des «groupes incontrôlés» et «ceux qui ont la charge de notre sécurité à tous». Des allusions claires aux organisations favorables au putsch du 22 mars qui ont accusé M.Traoré d'être un pur produit du régime renversé et qui avaient appelé à manifester contre son maintien au pouvoir, rassemblant lundi plusieurs milliers de personnes à Bamako. A Abidjan, l'ambassadeur de France à l'ONU Gérard Araud, a déclaré que l'agression de M.Traoré a «mis considérablement en danger» la sortie de crise au Mali malgré les efforts de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). «Il faudrait peut-être considérer maintenant d'autres voies», a-t-il ajouté, le ministre ivoirien des Affaires étrangères Daniel Kablan Duncan, estimant lui qu'on «ne peut pas continuer comme ça» et promettant des «mesures» rapides.