Les Libyens à l'épreuve de l'urne pour la première fois depuis l'indépendance du pays Les Libyens sont appelés à élire samedi les 200 députés «constituants» qui plancheront sur la future loi fondamentale du pays Les premières élections jamais organisées en Libye depuis le mandat italien auront lieu le 7 juillet. Effectivement, les Libyens sont appelés à élire les 200 députés du Congrès national. Ce parlement remplacera l'actuel Conseil national de transition (CNT) et sera chargé de nommer la commission d'experts de 60 membres chargés de rédiger un projet de Constitution, lequel sera ensuite soumis à référendum. Sur les 200 sièges, 120 seront occupés par des candidats indépendants et 80 par ceux issus de partis. Les électeurs auront à choisir, selon leur circonscription, un parti politique et un candidat individuel ou un seul parmi eux. Au total, plus de 2 500 candidats indépendants et 142 partis se présenteront. 629 femmes sont candidates. Elles sont bien représentées sur les listes des partis, qui alternent les candidats masculins et féminins, mais ne représentent que 3,4% de candidats individuels. Selon la Haute Commission nationale électorale, 2,850 millions de Libyens se sont inscrits sur les listes électorales, sur les quelque 3,4 millions en âge de voter. La répartition des sièges entre les trois régions est comme suit: la Tripolitaine à l'ouest, 100 sièges; la Cyrénaïque à l'est, 60 et Fezzan au sud, 40 sièges ne fait pas l'unanimité, surtout à l'Est où des bureaux de vote ont vu leur matériel détruit lors d'attaques perpétrées par des mécontents. Quant au Conseil national de transition (CNT), qui dirige la Libye depuis la chute du régime de Mouamar El Gueddafi, devra théoriquement démissionner après la proclamation des résultats et l'intronisation de l'Assemblée constituante, mais aucune date n'a été retenue pour l'annonce des résultats. Trois partis dominent le paysage politique libyen naissant: les Islamistes du parti de la justice et la construction (PJC), ceux d'Al-Watan de l'ex-chef militaire de Tripoli et candidat à l'élection, Abdelhakim Belhadj, et l'Alliance des forces nationales qui regroupe 58 partis politiques et 76 candidats indépendants réunis autour d'un manifeste et conduite par l'ancien Premier ministre de la révolution, Mahmoud Jibril, qui n'est pas candidat. Pour cette première Constitution libyenne, tous les partis et candidats libéraux prônent la loi islamique: la chari'â, comme source du droit, car il existe une sorte de consensus des principes très généraux qui ne divergent que très peu d'un parti à l'autre et d'un candidat à l'autre. En raison de sa fonction actuelle, Mahmoud Jibril est tout de même bien placé, tandis que les islamistes du parti de la justice et la construction et El-Watan souffriraient d'un problème d'image. «L'image des Frères musulmans est mauvaise à cause des dires de l'ancien régime. Nous allons la rectifier rapidement», assure Mohamed Sowan, leader du parti de la justice et de la construction, dont des membres font partie du réseau des Frères musulmans, tout comme le parti d'Al-Watan de Abdelhakim Belhadj, ancien commandant militaire de Tripoli et ancien djihadiste passé par l'Afghanistan. «C'est son passé. Maintenant, il est une personne civile comme tout le monde», commente Mohamed Gula, porte-parole du parti d'Al-Watan. Les gens vont voter pour ceux qu'ils connaissent. Pour certains, ce sera un voisin, pour d'autres une figure politique. Il n'en reste pas moins que les Libyens vont s'adonner à une première: élire des représentants à l'Assemblée nationale. Un exercice que la majorité d'entre-eux n'ont sans doute jamais connu que ce soit la génération qui a vécu sous le roi Idris 1er ou encore, surtout, sous le régime du Livre Vert de Mouamar El Gueddafi. Reste à savoir si cette entrée des Libyens dans le monde de la consultation électorale se fera par la grande porte et dans les normes admises, ou l'occasion serait-elle perdue? Nous le saurons au terme de ce scrutin inédit en Libye.