Une victoire méritée Bradley Wiggins, qui a consolidé son maillot jaune en remportant avant-hier le premier contre-la-montre du Tour de France 2012, a assis ses ambitions passionnées sur un travail rationalisé à l'extrême. «Les gars de Kilburn ne deviennent pas des favoris pour le Tour. Ils deviennent facteurs, laitiers ou travaillent à Ladbrokes (boutique de paris)», ironisait le Britannique, issu de ce quartier du nord de Londres, avant le départ du Tour de France face à une foule de journalistes. «Etre dans cette position, comme certains de mes héros, comme Miguel Indurain, c'est incroyable putain! En Angleterre, on ne parle que de football et le rêve de tous les gamins est de soulever la Coupe à Wembley. Ici, c'est mon Wembley», ajoutait-il. Wiggins est comme ça, spontané. Cela a longtemps joué des tours à ce roi de la piste -triple champion olympique, multi-champion du monde de poursuite individuelle et par équipes, etc.- qui rêve de connaître la gloire sur la route. Il l'admet lui-même: il a souvent eu du mal à contrôler ses émotions et la pression d'être attendu. Souvent il a cédé, notamment dans le Tour de France 2010 et 2011, après sa surprenante 4e place en 2009. En 2010, il a terminé 23e; l'an dernier, une mauvaise chute dès la 7e étape lui a brisé une clavicule et forcé à l'abandon. A 32 ans, il a dompté ses émotions à force de travail. Entièrement tourné vers le Tour de France, cet ex-fêtard passionné par la culture «mod» s'est attelé à la tâche, embrassant avec stakhanovisme une approche scientifique héritée de l'école britannique du cyclisme sur piste. Sa progression? «Du travail, tout simplement. Du putain de travail, et un putain d'encadrement derrière moi. Et beaucoup de dévouement et de sacrifices dans ma vie», explique-t-il. Depuis des mois, «Wiggo», qui a beaucoup maigri, avale des milliers de kilomètres avec toutes sortes de capteurs dont il décortique tous les résultats. Au point que certains se demandent aujourd'hui s'il fait plus confiance aux watts affichés sur son compteur qu'à ses propres sensations... Et quand on remet en cause ses progrès, notamment dans la montagne, son côté passionné ressurgit. Comme dimanche quand un journaliste a évoqué les comparaisons qui fleurissent sur les réseaux sociaux entre son équipe Sky et l'équipe US Postal de Lance Armstrong, sous-entendant du dopage. «Honnêtement, ce sont des putains de branleurs. Je ne supporte pas les gens comme ça. Cela explique leur propre oisiveté parce qu'ils ne peuvent pas imaginer s'impliquer dans quoi que ce soit dans leurs propres vies», a-t-il lâché. «C'est facile pour eux de s'asseoir là derrière un pseudonyme sur Twitter et d'écrire leur merde plutôt que de se lever le cul et aller travailler dur pour réaliser quelque chose», a-t-il poursuivi, avant de conclure: «Salopes.» Entouré par une équipe de «Galactiques du vélo» (Boasson Hagen, Froome, Cavendish entre autres) à son service, il est sûr de sa force. «Je suis confiant parce que je sais que j'ai fait le travail qu'il fallait faire cette fois», explique-t-il. «Je suis dans la forme de ma vie. Etre en tête n'est plus un poids psychologique», assure-t-il. Il lui reste deux semaines pour le démontrer.