Elle a été vantée par Chérif Kheddam, il y a 50 ans. Durant les années 1980, elle était la ville la plus propre d'Algérie. C'était Béjaïa, la vraie. Aujourd'hui, elle offre un tout autre visage, qui n'a de valeur que d'illustrer sa décadence. Béjaïa n'est plus l'âme des Kabyles. Elle a perdu son attrait depuis qu'elle ne se soucie plus de sa beauté et de son hygiène. Béjaïa sombre peu à peu dans le style de ville sans coeur et sans âme. Triste sort pour une ville qui fut celle des Lumières et du savoir. Capitale des plus grandes dynasties du Maghreb, Béjaïa se consume à petit feu. Eh oui! Quand on ne choisit pas les hommes qu'il faut à la place qu'il faut, il ne faut pas s'étonner de cette «reconversion» négative. Et lorsqu'on fait comme si de rien n'était et qu'on persiste à ignorer une réalité qui interpelle plus d'un, le résultat ne peut être que celui que l'on rencontre, aujourd'hui, à chaque coin de rue et quartier et dans toutes les contrées. Comme chaque été, la situation de l'hygiène à Béjaïa prend un sacré coup. C'est la même rengaine qui prend forme pour donner à la ville de Béjaïa, l'image d'un navire sans capitaine et des passagers irresponsables. En effet, les nombreux tas d'ordures prolifèrent à chaque coin de rues, des tonnes d'immondices qui jonchent les trottoirs et les services communaux de nettoyage donnent l'impression d'être incapables d'en assurer la collecte. Chaque jour, Béjaïa plonge dans l'insalubrité. Les Bougiotes s'en accoutument malgré eux. Avant-hier, à l'heure du passage des collecteurs d'ordures, un riverain s'est rapproché des employés de cette entreprise pour connaître les raisons de la présence d'un même amas d'ordures après quatre passages. L'éboueur lui répondit qu'il ne ramasse que les ordures rangées dans un sac poubelle. Ces éboueurs, d'un nouveau genre, n'osent pas se salir les mains». Il ajoute que si «un sac poubelle se déchire au ramassage, il abandonnera les ordures sur place». Un exemple parfait qui illustre la faillite de la gestion du dossier de la collecte des ordures dans la ville de Béjaïa. En dépit des tentatives de régulation tant pour le ramassage des ordures ménagères, que leur dépôt à des heures fixes, l'insalubrité est toujours présente et rappelle, à tout un chacun, le long chemin qui reste à faire en matière d'éducation civique. Un manquement qui s'ajoute à la défaillance d'une collecte encore archaïque. Des habitants continuent toujours de sortir leurs poubelles en dehors des heures fixées par l'arrêté communal et semblent loin, très loin de se soucier, aussi bien de la responsabilité de leur geste, que des représailles qu'ils encourent. Pis encore, on continue à déposer les sacs poubelles dans des endroits non réservés à cet effet. Ce qui complique la collecte déjà amoindrie par un parc matériel insuffisant et vétuste. Conséquences: rats, souris, cafards, moustiques envahissent nos cités. Certains rats sont tellement gros - bien nourris - qu'ils effraient le plus courageux des chats et même certains d'entre nous. Les moustiques sont si nombreux qu'une nuit sans pastilles ou climatiseur est synonyme de nuit blanche. Rien ne semble en mesure de les stopper. Depuis le début du mois de Ramadhan, période de forte consommation, la situation de l'hygiène s'est nettement aggravée. La campagne de pulvérisation se fait désirer. L'éradication des rongeurs et autres bestioles aussi. Le spectre des maladies et des MTH plane, tant le terrain de propagation y est propice. Si la commune est clairement désignée comme responsable de la situation, il reste que le laisser-aller et la mauvaise foi relevés chez les ménages, les commerçants et les passants aggrave la situation. L'insalubrité n'est pas propre à la ville de Béjaïa. Elle règne en maître dans de nombreuses localités environnantes. Les Aiguades, le Cap Carbon, Gouraya, Saket Boulimat, autant de lieux «touristiques», qui offrent un spectacle de désolation. A Béjaïa, tout le monde dénonce cet état de fait, mais personne ne juge utile de faire l'effort pour laisser aboutir des solutions préconisées pourtant par des spécialistes et après de longues études. Le cas du centre d'enfouissement de la commune de Béjaïa (CET) illustre, à lui seul, la complexité de la situation dans une ville qui ressemble à une mariée vêtue de haillons.