C'est le quatrième et dernier voyage sans retour des frères en compagnie, cette fois-ci, de leur père et de sa femme Racha, mère de Youcef et Benjamin. Le récit de Youcef, en dépit de ce qu'il avait enduré et vécu loin de sa famille, se termine ainsi en apothéose exceptionnelle. L'enfant adorable, promis à la prophétie dès son jeune âge, perdu et éloigné, tenu pour disparu, est enfin retrouvé non seulement sain et sauf, mais intronisé roi d'Egypte comme le rapportent à juste titre certaines sources. Les historiens et les exégètes, en l'absence de preuves et de documents, se limitent toutefois à mentionner que la plus haute fonction à laquelle était parvenu Sidna Youcef était celle de l'intendant du roi, soit l'équivalent d'un Premier ministre. Nous préférons la première version car on ne se prosterne que devant un monarque, selon la tradition. Cette version est appuyée par le Coran qui parle de trône et de prosternation de la mère et du père devant Youcef en signe de reconnaissance et non d'adoration. Youcef lui-même adressa des louanges à Dieu pour lui avoir attribué «une parcelle de ce pays», c'est-à-dire un pouvoir. On rapporte que Sidna Youcef avait hérité ce trône du roi d'Egypte, devenu monothéiste, celui-là même qui l'avait nommé Premier ministre. De même, sur le plan sentimental, Sidna Youcef avait fini par céder à la belle et talentueuse Zoulikha, devenue veuve et qui ne l'avait pas en vérité, laissé insensible de par son attachement et sa ténacité à l'avoir. Ils furent réunis dans un mariage somptueux. «Lorsque Yaâqob et les siens se rendirent en Egypte et se présentèrent devant Youcef, celui-ci offrit à son père et à sa mère une demeure près de la sienne et leur dit: «Entrez en Egypte en toute sécurité et selon la volonté divine.» (99) Il fit monter son père et sa mère sur le trône de sorte que les autres membres de sa famille tombèrent prosternés devant lui: «Cher père», dit Youcef, «voilà l'interprétation de mon songe de jadis. Mon Seigneur en a fait une réalité; il s'est montré bon envers moi en me faisant sortir de prison et en vous amenant du désert après la discorde jetée par Satan entre mes frères et moi. En moi, mon Seigneur est plein de grâce en tout ce qu'il veut. Il est l'Omniscient, le Sage.» (100) Le récit en vérité se termine ici. On rapporte que Sidna Youcef effectua un dernier voyage dans sa région natale pour enterrer son père, selon son souhait et testament. Lui-même aurait exprimé le même désir et aurait été enterré auprès de son père. Sentant la mort proche, il dit cette imploration: «Seigneur ! Tu as accordé une parcelle sur ce pays et initié à une partie de l'interprétation des songes. Ô créateur des cieux et de la terre, tu es mon maître en ce monde et dans l'au-delà! Reçois-moi quand je serai mort en homme soumis à ta volonté et fais-moi rejoindre les siens.» (101) Le règne de Youcef, plein de justice et de prospérité, avait du reste marqué profondément Oum Dounia et ses environs, en les sauvant de deux maux: la famine et l'idolâtrie. Son impact sur la société égyptienne était resté jusqu'à la venue du prophète Moïse, six à sept siècles plus tard. Dans sourate Ezoumar, un proche du Pharaon qui intervint en faveur de Moïse, apporta un témoignage frappant en leur rappelant le legs de Youcef. Demain : La leçon du récit (ENTV : 15 h 15/AT :17 h 15)