«Le cholestérol est comme le western: il y a le bon et le méchant.» Jean Lemieux J'avais parlé dernièrement de la fascination que pouvait exercer le septième art sur des esprits vierges qui vont, des années durant, subir sa bénéfique ou sa néfaste influence. C'est ainsi, et le cinéma hollywoodien l'a, le premier compris, que des films présentant des archétypes de caractères vont être projetés dans le monde entier pour montrer les côtés positifs de la civilisation américaine. Le genre qui excellera dans ce but est, sans conteste, le western. C'est lui qui s'attachera à montrer, à travers le plus souvent des caricatures grossières, la conquête de l'Ouest américain et la construction d'une société où sont mis en évidence l'effort personnel, l'esprit d'initiative et le courage, le tout enveloppé dans une violence qui finira par devenir l'élément caractéristique de cette société. Le spectateur moyen finira, au gré des nombreuses projections auxquelles il se soumettra avec le plus grand plaisir, par assimiler les concepts et les analyses de scénaristes de Hollywood dont la tâche essentielle est de montrer leur société comme l'idéal de toutes les autres sociétés. C'est ainsi que se forgera l'image du héros américain pour lequel vont battre tous les coeurs des spectateurs tétanisés. Courage, bravoure, loyauté, créativité, patriotisme sont les traits caractéristiques de ces héros dont le physique irréprochable s'alliera à une galanterie exemplaire qui sera toujours récompensée dans les films où ils passent leur temps à défendre les faibles contre les forts. Evidemment, pour servir de contrepoint à ce héros, on présentera des personnages négatifs, les outlaws sans scrupules, les cupides chercheurs d'or, les gros éleveurs à l'appétit démesuré et, bien entendu, les Indiens. Ceux qui ont été les victimes de l'expansion anglo-saxonne dans ces vastes espaces sous-peuplés, vont être montrés pendant longtemps comme des bandes de sauvages belliqueux qui ne connaissent que le seul langage de la force. Le cinéma américain s'attardera sur l'esprit d'organisation des vaillantes «Tuniques bleues» et le désordre criard des meutes de peaux-rouges montant à l'assaut des «Longs-couteaux» sagement repliés dans leurs forts ou derrière des chariots mis en cercle. La supériorité de l'armement des blancs et leurs stratégie suppléeront au désavantage du nombre. C'est en revoyant, cinquante ans après sur Arte, la Charge héroïque (She wore a yellow ribbon) de John Fords que j'ai compris que seuls les grands films classiques véhiculant des idées humanistes peuvent résister à l'épreuve du temps. Les cavalcades des «Tuniques bleues» dans «Monument Valley» sont d'un ennui désespérant et un John Wayne aux tempes grisonnantes a perdu de sa crédibilité. Il faut dire que d'autres grands films comme «La Flèche brisée», «Cheyenne Antunum» ou «Little big man» ont complètement changé l'image de l'Indien dans la mémoire collective. Cependant, il y a un point sur lequel la «Charge héroïque» ne se trompe pas, c'est le recyclage des officiers américains dans le civil!