Le quatrième pouvoir est dans tous ses états en Tunisie Le pouvoir issu de la révolution du 14 janvier 2011, veut avoir la mainmise sur les médias tunisiens afin d'assurer sa légitimité. Un véritable bras de fer est engagé depuis quelque temps, entre les journalistes tunisiens et le gouvernement islamiste Ennahda, majoritaire au gouvernement. Les deux parties s'accusent mutuellement, de travailler et appartenir à la police politique de l'ex-régime déchu de Ben Ali. L'une des premières victimes des pressions subies, est le groupe Essabah, qui regroupe deux journaux le Temps en français et Essabah en langue arabe, qui se dirige vers une nouvelle forme de sociétés de rédacteurs, pour sauver le journal d'une mort certaine. D'autre part, une liste noire des journalistes, appartenant à l'ex-régime de Ben Ali, fait polémique à grande échelle dans la presse tunisienne. Pour réagir aux sérieuses menaces qui pèsent sur la corporation, le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt) a réuni vendredi dernier, lors d'une assemblée générale extraordinaire à l'hôtel international de Tunis toute la corporation et, s'est dit déterminé à aller jusqu'au bout pour arracher son indépendance de toute tutelle politique. Il devra même rendre une décision d'une grève générale avant le 15 septembre prochain. Déçu et contrarié par les nominations de complaisance politique des patrons des radios et presse, le Snjt à qualifié les nominations «d'arbitraires», tout en se disant mobilisé plus que n'importe quel temps, pour éviter le retour aux «pratiques féodales» de l'ex-régime, renversé le 14 janvier 2011. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler la tenue d'un rassemblement de journalistes tunisiens plus ou moins important, mercredi passé devant le Palais du gouvernement à la Casbah à Tunis, afin de réitérer leur appel à l'union et la solidarité des médias pour dénoncer l'arbitraire et la mainmise sur les médias. «Nous sommes lésés. Le pouvoir issu de la révolution, veut avoir la mainmise sur les médias tunisiens, en nommant des responsables à la tête d'importants groupes médiatiques, rien que pour assouvir leurs soif et faim politique, aux dépens de l'opinion publique et de la déontologie journalistique», a regretté Hanène Z., une journaliste du journal Réalité. Faisant référence au parti islamiste Ennahda, qui veut placer ses pions peu à peu et sans aucune consultation des concernés, les Tunisiens et Tunisiennes restent mobilisés et déterminés pour arracher leurs droits à la liberté d'expression, qui y va de l'intérêt général des Tunisiens, a-t-on souligné. Croyant révolues à jamais les anciennes pratiques du régime déchu depuis plus de 20 mois, et malgré le sacrifice de près de 300 personnes, lors de la révolution du 17 décembre 2010, les journalistes tunisiens affirment que ce n'est que le début d'un long combat à poursuivre pour réhabiliter la mémoire des dizaines de citoyens qui ne sont plus de ce bas monde, depuis, et ce, rien que pour sortir dans la rue pour défendre la liberté et la dignité de la citoyenneté tunisienne. «Le parti islamiste Ennahda, ne fait que commencer à appliquer sa politique régressive, et ce, en prenant en porte-à-faux les promesses du respect des libertés médiatiques et citoyennes avancées», ont rappelé de nombreux journalistes que nous avons rencontrés le même jour du rassemblement, malgré une chaleur caniculaire, avec quelques élus de la mouvance démocratique qui les soutiennent. Pour poursuivre son mouvement de protestation, le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), a inscrit une plate-forme de revendications de 10 points, à commencer par le principe du maintien de l'indépendance de la presse, en tant que quatrième pouvoir, l'amélioration des conditions socioprofessionnelles des journalistes, la levée des tentatives de verrouillage du champ médiatique tunisien à tout jamais. Rencontré en marge de la tenue du deuxième congrès pour la République (CPR), les 24, 25 et 26 août au Palais des congrès à Tunis, Abdelwahab Maâttar, ministre de l'Emploi et de la Formation du nouveau gouvernement tunisien, a ajouté de l'huile sur le feu dans la presse tunisienne en répondant à notre question en marge du congrès, «que les journalistes tunisiens peuvent faire une grève d'une année s'ils veulent. Car cette corporation a déjà servi le régime de Ben Ali», lance-t-il. S'agissant des attentes du gouvernement tunisien par rapport à l'Etat algérien, le ministre s'est dit «très respectueux des décisions politiques de l'Algérie», tout en appelant à soutenir la démarche de la très jeune République tunisienne qui date d'à peine deux ans.