Les ouvrages d'apprentissage de tamazight sont davantage demandés par le lecteur en comparaison de la littérature amazighe qui nécessite un «travail de fond» basé sur le contenu, le style d'écriture et la créativité, estiment des chercheurs spécialisés dans la culture amazighe. S'exprimant lors d'une rencontre organisée lundi dans le cadre du 17e Salon international du livre d'Alger (Sila), sous le thème «Enjeux linguistiques et nouveaux champs de l'édition pour le livre amazigh», les orateurs ont fait comprendre que les publications en tamazight, qui suscitent l'intérêt du lecteur, sont, notamment, les dictionnaires, les études linguistiques et autres supports pédagogiques. Selon eux, la curiosité du lecteur est davantage orientée vers les mécanismes d'apprentissage de cette langue que sur les livres littéraires (romans, essais et recueils poétiques) dont le volume est «restreint», impliquant des questionnements sur leur contenu, ont-ils estimé. Parlant de la relation entre l'édition, le lectorat et la diffusion de livres en tamazight, l'auteure et chercheure en patrimoine amazigh, Mme Tassaâdit Yacine, considère que cette dernière «existe», tout en s'interrogant sur la «qualité des oeuvres vendues». Pour elle, le statut de langue nationale ou officielle de tamazight ne peut à lui seul créer de grands écrivains ou garantir son émancipation, si celle-ci n'est pas nourrie d'une pensée littéraire fondée sur la verve poétique, l'imaginaire de l'auteur et des spécificités mêmes de cette langue. Abondant dans le même sens, le directeur du Centre national pédagogique et linguistique de l'enseignement de tamazight, M.Abderrazak Dourari, a estimé qu' «il faut se garder de se vanter d'avoir réglé tous les problèmes de la langue amazighe, en l'absence d'un traitement en profondeur de la question». A ses dires, la tradition littéraire amazighe est en train de s'ancrer petit à petit car tamazight est habituellement plus parlé qu'écrit, ce qui nécessite un travail de fond axé sur la sociologie de la lecture, les variations de la langue et les traditions amazighes, notamment. Pour sa part, Fatma-Zohra Oufara, chercheure à l'Institut royal de la culture amazighe (Ircam) du Maroc, a mis l'accent sur la difficulté du passage de l'oralité à l'écriture, en soulignant que le développement et l'émancipation de la langue amazighe sur le plan littéraire méritent des «efforts conjoints entre l'ensemble des institutions et établissements qui s'intéressent aux langues». La 17e édition du Salon international du livre d'Alger (Sila), qui se tient depuis jeudi au Palais des Expositions, se poursuivra jusqu'au 29 septembre.