Moncef Marzouki et José Mujica lors de leur débat à la Bibliothèque nationale de Lima au Pérou L'un est Tunisien, symbolise ledit «printemps arabe» l'autre est Uruguayen et la fin de la dictature militaire en Amérique latine. Le sommet de l'Aspa à Lima les a réunis. Ils ont connu la lutte et la prison, l'un symbolise le printemps arabe, l'autre la fin de la dictature militaire en Amérique du Sud. Réunis au Sommet de l'Aspa, les présidents de Tunisie, Moncef Marzouki et d'Uruguay, José Mujica, ont évoqué lundi soir avec passion leur expérience de la démocratie. «L'histoire de l'Amérique latine depuis près de 200 ans, c'est que nous voulons prendre le bras de cette fiancée qu'on appelle démocratie», a lancé le président uruguayen, 77 ans, lors d'un dialogue animé organisé à la Bibliothèque Nationale de Lima, en marge du IIIe Sommet de l'Aspa. «Nous avons progressé comme société», a estimé le président Mujica, dénonçant les «énormes inégalités» en Amérique du Sud. Mais «la grande vérité que nous avons appris», a ajouté l'ancien leader des Tupamaro dans les années 1960-70, «c'est que la démocratie n'est pas parfaite, mais éternellement perfectible». «Nous avons appris que notre chère démocratie libérale était, comme le disait Churchill, «le pire des systèmes... à l'exception de tous les autres», a poursuivi le président uruguayen, dont le langage imagé et l'humour ont conquis le public, dont de nombreuses personnalités politiques péruviennes. Le président Moncef Marzouki, 67 ans, médecin de formation qui a longtemps vécu en France et président de la République tunisienne depuis décembre 2011, a indiqué pour sa part qu'avec le «printemps arabe» la démocratie était en marche dans les pays arabes «qui ne reviendrons pas à leur situation antérieure». «Notre révolution est entrée dans l'histoire, a-t-il martelé, parce que 300 millions d'arabes se sont débarrassés de leur peur». Le président tunisien qui s'exprimait en arabe traduit en espagnol, a reconnu «ne pas savoir jusqu'où ira la Révolution arabe ni ce qu'il adviendra d'elle dans 50 ans». Mais ce que je sais, a-t-il ajouté, «c'est que les systèmes totalitaires arabes sont finis», et ce «qui importe, c'est d'avoir récupéré notre dignité». Il a estimé que «les révolutions qui ont donné le pouvoir aux islamistes ont fait un cadeau empoisonné parce que ceux-ci n'ont pas la capacité de gérer la situation et pourraient perdre leur pouvoir lors de prochaines élections.» Louant par ailleurs «l'héroïsme du peuple syrien, nous voyons qu'il nous envoie un message: nous allons en finir avec un régime despotique et nous y parviendrons tôt ou tard», a-t-il assuré. Le premier ministre péruvien, Juan Jiménez, qui participait au débat a rendu hommage aux deux présidents «des combattants qui connaissent la lutte pour la liberté et ont perdu leurs peurs pour défendre la démocratie et nous montrer le chemin». «Deux hommes qui savent ce que signifie lutter et souffrir», a-t-il conclu. Après Brasilia en 2005 et Doha en 2009, ce troisième sommet - le premier depuis le début du printemps arabe - rassemble à Lima les pays membres de la Ligue arabe et de l'Union des nations d'Amérique latine (Unasur). Les représentants de 20 des 32 membres de l'Aspa participent à la rencontre qui culminait hier avec le Sommet des chefs d'Etat, mais seulement quatre chefs d'Etat arabes ont fait le voyage de Lima: le président libanais Michel Sleimane, le président tunisien Moncef Marzouki, l'émir du Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, et le roi de Jordanie, Abdallah II.