Vers la fin du diktat des gardiens de parkings Les gardiens de parkings informels estiment que l'Etat ne pourra pas appliquer cette décision. Néanmoins, ils se disent prêts à rentrer dans le rang si une solution de rechange leur est proposée. Fini l'anarchie! Après les marchés informels, l'Etat va s'attaquer aux parkings sauvages. En effet, le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales Daho Ould Kablia a annoncé que l'Etat va placer les parkings publics sous l'autorité de la police. «Il n'est plus possible de continuer à s'accommoder du comportement de jeunes gens qui s'autoproclament gardiens de parkings et qui constituent parfois un danger pour les automobilistes», a affirmé le ministre Mardi à Constantine. Une façon pour M.Ould Kablia de réaffirmer sa fermeté quant à l'éradication de l'anarchie qui règne en maître dans le pays. C'est ainsi qu'il a été décidé de les «placer sous l'autorité des services de sécurité», a souligné le ministre de l'Intérieur. Pour lui, «cette action permettra aux automobilistes de s'assurer de leur véhicule sans se trouver à la merci de jeunes désoeuvrés s'autoproclamant gardiens». Est-ce donc la fin du racket que subissent quotidiennement les automobilistes. La fameuse formule «Aamo Rana hna», sera-t-elle aussi mise aux oubliettes. Toutefois, une question se pose: est-ce que l'Etat va pouvoir appliquer cette décision? Surtout que ce n'est pas la première annonce du genre. Au mois de juin 2006, déjà l'ex-ministre de l'Intérieur Yazid Zerhouni avait émis une circulaire dans le même sens. Elle portait sur les «mesures d'encadrement des activités de surveillance des parkings de voitures». Il «définit les espaces à transformer en parkings et ceux à accorder par concession à des personnes qui doivent s'organiser en coopératives de surveillance de parkings». Toutefois, six ans plus tard, cette circulaire n'a pas été appliquée et les gardiens de parkings dictent encore leurs lois... Alors Ould Kablia réussira-t-il là où son prédécesseur a échoué? Et pour réussir a-t-il prévu des moyens de substitutions? Des parcmètres? Ou va-t-il régulariser les jeunes des parkings et les intégrer dans le circuit légal comme cela a été fait avec les marchands informels? En tout cas, ce «nouveau» chantier est tout à fait réalisable car le terrain est déjà balisé par la réussite de l'éradication des marchés informels. Il y a également la circulaire de Zerhouni qui définit la concession des parkings publics. Les autorisations de gardiennage ne peuvent être délivrées, selon cette circulaire, que par le président de l'APC, notamment quand il s'agit d'espaces situés à l'intérieur de l'agglomération ou quand il s'agit de voirie communale. Zerhouni avait déjà tenté le coup! Outre le paiement des redevances à la commune, le bénéficiaire doit être nommément désigné et son activité ne doit, en aucun cas, gêner l'usage normal de la dépendance domaniale. Pour délimiter les espaces concernés, la wilaya et les communes sont chargées d'identifier les terrains susceptibles d'accueillir des parkings, à travers un recensement d'espaces publics se prêtant à cet usage, conformément aux lois et règlements. Il s'agit entre autres de réaliser des parkings à étages, comme c'est le cas à Alger et Oran où des projets sont en cours. Les espaces ainsi dégagés doivent faire l'objet d'un plan de gestion consistant à définir le nombre et la situation géographique des parkings à concéder aux bénéficiaires qui doivent, au préalable, s'organiser en coopératives de gardiennage de parkings, conformément au Code civil. La commune délivre une autorisation de l'exercice de gardiennage sur la base d'un cahier des charges élaboré par la commune et signé par les deux parties. La coopérative doit s'acquitter d'une redevance au profit de la commune, calculée selon le nombre de véhicules, la situation et l'attraction du site, la possibilité de stationnement durant les heures de travail, etc. Concernant les éventuels bénéficiaires, la circulaire stipule clairement que la priorité dans l'octroi des autorisations doit être accordée aux jeunes chômeurs résidant dans le quartier où se situe le parking. Il suffira donc à Ould Kablia juste de «sommer» ses éléments à appliquer cette circulaire. Cependant, le gros problème réside dans l'application de cette mesure. Comment le faire sans réveiller la colère de ces jeunes «racketteurs»? Ould Kablia arrivera-t-il à dompter la mafia du parking? C'est cela le grand défi, surtout que ces derniers annoncent d'ores et déjà la couleur. «On ne se laissera pas faire», nous ont lancé sèchement la majorité des gardiens de parking interrogés. En effet, pour avoir leur avis sur la question, nous avons décidé d'aller à leur rencontre dans les artères de la capitale. La mafia du parking prête à dégainer... Notre tournée a commencé à Bachdjarah où nous avons rencontré un jeune adolescent à qui nous avons demandé son avis sur le démantèlement des parkings sauvages. Il s'est contenté de nous rire au nez en lancant «Inahouna? rahoum inahou! (ils vont nous éradiquer, oui ils sont en train d'éradiquer)», dit-il ironiquement. Même réponse chez son collègue qui toutefois, réplique en disant que «si l'Etat touche à leur gagne-pain, ils allaient brûler le pays»! Les gardiens de parkings de l'ex-Meissonnier eux, semblent plus calmes. Même s'ils certifient qu'ils n'allaient pas se laisser faire. Ils se disent néanmoins prêts à rentrer dans le rang si l'Etat leur proposerait des solutions de rechange. «Qu'ils nous fassent comme ils ont fait aux vendeurs informels, c'est-à-dire qu'ils nous trouvent une solution pour nous intégrer dans la légalité. À ce moment, on pourra discuter!», assure l'un d'eux. Même topo chez la majorité des gardiens de parkings interrogés dans les autres coins de la capitale. Il y a même certains qui vont plus loin en exigeant à ce que l'Etat, s'il venait à louer ces parkings, le fasse à des prix symboliques! «Je n'ai pas l'intention de diminuer mes bénéfices pour leurs beaux yeux», peste avec assurance un jeune qui tient un parking à Belouizdad. La mission de Ould Kablia semble donc être difficile. Seules la fermeté et la prise de décision radicale, lui permettra d'arriver aux résultats escomptés.