La CIJ de La Haye a été appelée, par l'Assemblée générale de l'ONU, à statuer sur le mur israélien. L'Assemblée générale de l'ONU a adopté tard dans la soirée de lundi, un projet de résolution demandant la saisine de la Cour internationale de Justice (CIJ, sise à La Haye aux Pays-Bas) dans l'affaire de la construction par Israël d'un mur «de défense» en territoire palestinien de Cisjordanie. Le projet de résolution, déposé la semaine dernière par le représentant palestinien aux Nations unies, Nasser Al-Kidwa, a recueilli 90 voix pour, 8 contre et 74 abstentions, -dont celle des membres de l'Union européenne-, devenant ainsi une résolution de l'Assemblée générale de l'ONU Cette saisine de la Cour internationale, incontestablement une victoire politique, et en même temps morale, pour les Palestiniens, donne enfin l'opportunité à la CIJ par la lecture et les attendus, du dossier israélo-palestinien, qu'elle sera amenée à faire de dire le droit, en conformité avec les lois internationales, -et sans doute, enfin, officialiser une ligne de partage (ou frontière) entre l'Etat hébreu et les Palestiniens- Dans le dossier du Proche-Orient, les Israéliens se sont toujours attribués les rôles de juge et partie, ne reconnaissant ni le Conseil de sécurité, ni l'ONU ou autres instances internationales dès lors qu'il est question d'Israël. C'est le seul Etat du monde, en fait, auquel «rien n'est imposé» ou, pour reprendre les déclarations de responsables israéliens, rien ne «doit être» imposé à l'Etat hébreu Aussi, il était en fait temps qu'une institution telle que la Cour internationale de Justice dise enfin qu'elles sont les frontières internationalement reconnues de l'Etat hébreu, où s'exerce sa loi, d'une part, et mette en garde Israël sur ses tentatives de changer la ligne de démarcation, ou ligne verte, entre les deux territoires juif et arabe, au détriment des Palestiniens, d'autre part. Les Israéliens, invoquent leur droit de se défendre, certes, mais omettent le fait que la source essentielle des violences dans les territoires palestiniens occupés, et en Israël même, résultent de l'occupation par l'Etat hébreu des territoires palestiniens. De fait, la résolution 1514 de 1960 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui reconnaît le droit à l'autodétermination des peuples colonisés, -ce qui est le cas dans les territoires palestiniens-, leur reconnaît également le droit de lutter pour leur indépendance. Si le dossier proche-oriental perdure depuis plus de 55 ans c'est bien du fait de l'irrédentisme israélien, et le principe, cité plus haut, selon lequel on n'impose rien à Israël, ce qui élimine de fait toute tentative tierce de trouver une solution équitable pour les deux communautés juive et palestinienne. En mars 2001, grâce au veto des Etats-Unis au Conseil de sécurité, Israël avait alors réussi a empêché l'envoi, au Proche-Orient, d'une force internationale de séparation et d'interposition entre les deux belligérants israéliens et palestiniens. Israël entreprit par la suite de construire une «barrière de défense» qui, à l'origine devait suivre la «ligne verte», ligne de démarcation de juin 1967, séparant les deux entités Toutefois, le tracé du «mur» allait rapidement dévier pour s'enfoncer profondément, dans certains endroits jusqu'à plus de 22 kilomètres à l'intérieur de la Cisjordanie. En focalisant sur le terrorisme, Israël a délibérément brouillé les cartes en occultant le fait qu'il faisait face à une résistance nationale et une lutte de libération et que son occupation des territoires palestiniens alimente une violence qu'Israël qualifie trop facilement de terrorisme, alors même que la résistance nationale est admise et soutenue par toutes les instances internationales. Dans une première réaction, le porte- parole du gouvernement israélien, Raanan Gissin, a affirmé à la presse qu' «il est très regrettable qu'un groupe de pays se serve cyniquement de l'Assemblée générale de l'Onu pour délégitimer un Etat membre. L'Etat juif est le seul à avoir été mis en demeure de devoir rendre compte à un tribunal de son droit légitime de se défendre». Ce qui est très spécieux de la part du membre du gouvernement israélien si l'on songe qu'Israël, seul Etat au monde à le faire, n' a appliqué aucunes des résolutions du Conseil de sécurité de l'Onu, à l'exception de la résolution 181 du 29 Novembre 1947 portant partage de la Palestine historique entre un Etat juif et un Etat arabe. C'est également le seul Etat au monde qui a empêché, par le veto des Etats-Unis, une commission spéciale du Conseil de sécurité d'enquêter sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis contre la population palestinienne de Jenine en juin 2002. Les Israéliens sont les occupants d'un territoire qui ne leur appartient pas et il est naturel qu'ils rendent comptent de leurs actes devant le tribunal désigné par la communauté internationale. Si aujourd'hui, les Israéliens sont contraints de le faire, c'est bien le fait que l'Assemblée générale des Nations unies, -où le veto n'est pas de mise-, qui a déjà condamné à une écrasante majorité, (à la fin du mois dernier), la construction du mur en territoire palestinien, veut en connaître les tenants et aboutissants et Israël doit enfin s'expliquer devant la Cour internationale de Justice sur sa politique d'occupation des territoires palestiniens. Ces derniers, très mesurés ont accueilli avec la satisfaction que l'on devine le vote de l'Assemblée générale de l'Onu adoptant leur projet de saisine en en faisant une résolution de l'ONU. Pour les Palestiniens, en effet, cette résolution est «une victoire du droit» affirmant. «Il s'agit d'un message de la communauté internationale qui indique à Israël de stopper la construction du mur et ses agressions». Entre Palestiniens et Israéliens, une longue bataille juridique est ainsi lancée à l'issue de laquelle, il ne fait pas de doute, la décision jurisprudentielle de la Cour internationale de Justice viendra renforcer la résolution 1515 du Conseil de sécurité portant sur la «feuille de route». Une «feuille de route» qui, de par les tergiversations d'Israël, n'arrive pas à sortir de ses starting-block. En tout état de cause l'heure du choix semble venue pour Israël qui ne peut plus jouer à l'esquive comme il le fait depuis plus d'un quart de siècle.