D'ores et déjà se profile, en ligne de mire, l'affaire du «mur» prochainement devant la Cour internationale. En entreprenant la construction d'un mur de défense qui chevauche largement en profondeur dans le territoire palestinien occupé en Cisjordanie, Israël outre de défier la communauté internationale, met à mal le processus de paix que le quartette (USA, UE, ONU et Russie) essaie laborieusement de faire démarrer. Cet ouvrage qui traverse champs et villages palestiniens, dont plus de 140 Km ont déjà été achevés, vise, selon ses promoteurs, à empêcher les infiltrations de fedayin palestiniens -les opérations kamikazes menées par la résistance en Israël même montrent en fait l'inanité d'un tel projet- concourt d'une part à déstructurer les populations palestiniennes par la séparation des familles lesquelles se retrouvent des deux côtés du mur, d'autre part à englober une grande partie des colonies juives, donnant au gouvernement israélien d'annexer ce territoire qui représente près de 20% de la Cisjordanie. C'est dans ce contexte que va s'ouvrir dans les prochaines semaines, -l'ouverture des audiences a été fixée au 23 février prochain par la Cour de La Haye-, l'affaire «du mur» devant la Cour internationale de Justice (CIJ) appelée à statuer sur la question. C'est à la demande du représentant permanent de l'Autorité palestinienne à l'ONU, Nasser Al-Kidwa, que l'Assemblée générale de l'ONU a demandé le 8 décembre à la CIJ de faire une expertise sur cette affaire et de se prononcer sur les conséquences légales de l'édification de la ligne de séparation par Israël. Certes, les avis que donne la CIJ n'ont pas d'effets obligatoires, étant entendu qu'il appartient aux institutions ayant requis son appréciation de faire concrétiser ses jugements. Mais d'ores et déjà chaque partie commence à préparer ses dossiers faisant valoir son point de vue sur la question. Il sera à tout le moins difficile à Israël de justifier l'édification d'un ouvrage, de l'envergure du mur en construction, sur le territoire d'un pays qu'il occupe. Occupation de fait contestée par les Palestiniens et objet de plusieurs résolutions de la part du Conseil de sécurité de l'ONU. Résolutions qui n'ont jamais été appliquées par Israël qui bénéficie du veto des Etats-Unis ayant annihilé toute condamnation de l'Etat hébreu ou demande de retrait des territoires palestiniens faites par le Conseil de sécurité. En fait, la position de l'Etat hébreu est tellement peu défendable que des ministres israéliens commencent à s'inquiéter des suites et des retombées que l'arrêt de la CIJ pourrait avoir sur les relations d'Israël avec l'extérieur. Ainsi, selon le vice-Premier ministre et ministre de la Justice israélien Yossef Lapid du parti Shinouï (centre) «Il y a un danger que nous soyons exposés au boycottage international comme cela a été le cas pour l'Afrique du Sud jusqu'à la chute du régime (d'apartheid de ce pays)». Le même d'ajouter «Tout cela nous arrive du fait que nous ne nous sommes pas contentés de la clôture de sécurité d'origine (elle devait au départ suivre la ligne verte, ou ligne d'armistice de 1948, «frontière» entre Israël et les territoires palestiniens occupés en Cisjordanie) et avons changé son tracé». «Voilà pourquoi je suggère d'examiner à nouveau cette question» ajoute le ministre israélien. Ne voulant pas laisser passer cette occasion d'épingler enfin Israël par une institution internationale telle que la CIJ, -même si cette dernière a seulement un rôle consultatif-, la ligue arabe prépare sérieusement son dossier appelant les 22 membres de la ligue d'en faire de même pour présenter le 23 février un dossier solide devant la CIJ. Dans ce contexte, le secrétaire général de la ligue arabe Amr Moussa indique : «Nous avons mis en place une équipe de travail pour présenter l'affaire devant la CIJ afin que celle-ci puisse rendre un jugement équitable (sur cet ouvrage)». Le secrétaire général de la ligue arabe qui donnait à Amman une conférence de presse en compagnie du ministre jordanien des Affaires étrangères, Marwan Moasher, ajoute : «Nous coordonnons nos efforts avec plusieurs avocats internationaux sur cette affaire ainsi que la ligue arabe, et aujourd'hui nous avons longuement discuté de cela» (cf: Amr Moussa était dimanche en visite en Jordanie). En fait, l'affaire du «mur» donne enfin l'opportunité à la communauté internationale de dire si l'Etat hébreu est un Etat hors catégorie au dessus des lois internationales, auquel tout est permis, ou peut être permis, ou s'il est, à l'instar des autres Etats du monde, soumis au droit international et aux lois communes gérant les relations entre les nations. L'impunité dont jouit Israël, protégé par le veto des Etats-Unis des condamnations du Conseil de sécurité, va-t-elle enfin avoir un terme devant la CIJ par le rappel de l'Etat hébreu à ses devoirs, -en tant qu'occupant-, envers la population palestinienne, d'une part, et en décrétant illégal la construction du mur de l'apartheid, d'autre part. De fait l'illégalité du «mur» entraînerait l'illégitimité des colonies implantées dans les territoires palestiniens par l'occupant israélien. D'autant que ce mur et ces colonies font obstacle à la création de l'Etat palestinien indépendant prévu à l'horizon 2005 par la «feuille de route».