Comme il fallait s'y attendre, et Israël avait anticipé une telle décision, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye a jugé hier contraire à la loi internationale la barrière érigée par Israël en Cisjordanie et appelé au démantèlement des parties déjà construites. « La construction du mur érigé par Israël, la force occupante, dans le territoire palestinien occupé, y compris dans et autour de Jérusalem, et les dispositions qui y sont associées, sont contraires à la loi internationale », affirme la CIJ dans son avis. Dans ses conclusions, la CIJ, sollicitée par l'Assemblée générale de l'ONU, appelle cette instance et le Conseil de sécurité à mettre fin à la construction de la barrière israélienne. « Les Nations unies, notamment l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité, doivent examiner quelles mesures supplémentaires doivent être prises pour mettre fin à la situation illégale résultant de la construction du mur et les dispositions qui y sont associées en tenant compte du présent avis consultatif », affirme la CIJ dans le document. La cour réclame également que les Palestiniens qui ont subi des dommages du fait de la construction de l'ouvrage soient indemnisés. Elle indique que « tous les Etats ont l'obligation de ne pas reconnaître la situation illégale résultant de la construction du mur » et de ne rien faire qui soit de nature à la prolonger. Dans leur dernière conclusion, les juges en appellent à l'assemblée et au Conseil de sécurité de l'Onu, leur demandant de « considérer quelles actions doivent être entreprises pour mettre fin à la situation illégale résultant de la construction du mur ». A vrai dire, l'avis de la CIJ tel que formulé était attendu, et il ne faisait pas mystère sauf si cette cour venait à commettre un grave déni de justice. Au demeurant, elle avait tous les éléments en main, principalement les résolutions de l'ONU qui définissaient les limites territoriales ou encore les frontières qu' Israël, créé par une résolution onusienne, refuse de reconnaître. Israël s'attendait d'avance à cet avis, dont la formulation avait été évoquée par le secrétaire général de l'ONU avant même qu'une saisine de la CIJ soit envisagée. Kofi Annan avait, en effet, mis en garde non pas contre l'édification du mur mais contre l'accaparement de nouveaux territoires palestiniens et par conséquent leur annexion, une manière bien particulière de donner raison aux Palestiniens qui y voyaient une frontière de fait, puisque son tracé épousait au détail près la logique développée par les différents gouvernements israéliens, principalement celui d'Ariel Sharon. On y retrouve les fameux pourcentages correspondant aux espaces territoriaux à restituer aux Palestiniens, et ceux qu'Israël entend conserver dans le cadre de ce que toute la classe politique israélienne considère comme les questions consensuelles ou encore les espaces supposés nécessaires pour sa sécurité. Ce qui est absolument faux pour la simple raison que les régions actuellement occupées, y compris au Liban et en Syrie, étaient convoitées dès 1919, soit avant même la création d'Israël, parce que riches en eau. Ce qui veut dire que le problème demeure entier parce que, par ailleurs, Israël refuse de souscrire aux obligations que lui impose la légalité internationale, aujourd'hui incarnée par l'avis de la CIJ, et cet Etat a déjà fait savoir qu'il n'appliquera pas la décision qui sera prise concernant le fameux mur de séparation. Il a, dans ce contexte, anticipé l'annonce des conclusions et demandé très officiellement aux Etats-Unis d'intervenir afin de bloquer toute suite politique cette fois qui viendrait à être prise par le Conseil de sécurité dont la saisine par l'Assemblée générale de l'ONU apparaît comme la suite logique de ce processus qui avait commencé par un veto américain au sein de l'instance exécutive de l'ONU, obligeant le groupe des Etats arabes à déplacer le débat au sein de l'Assemblée générale réunie en session extraordinaire en décembre dernier. Israël craint qu'un avis négatif de la CIJ n'entraîne le dépôt d'une nouvelle résolution devant le Conseil de sécurité exigeant le démantèlement de la barrière. Israël estime toutefois pouvoir compter sur l'appui des Etats-Unis pour contrer cette nouvelle offensive diplomatique. Les Etats-Unis et les pays de l'Union européenne, qui n'avaient pas pris part aux audiences publiques de la CIJ sur cette affaire en février dernier, jugent que saisir la Cour est inopportun et pourrait remettre en cause une éventuelle reprise des négociations de paix. Le prétexte est bien commode pour conforter la position israélienne, alors que rien n'est fait pour imposer un processus de paix sérieux et viable. La faute incombe à Israël toujours déterminé à avoir la paix et les territoires.