Qu'a dit de nouveau le chef du gouvernement israélien que l'on ne sache déjà? Egal à lui-même, le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, après avoir fait lanterner son monde durant plusieurs semaines accouchait, dans son discours de jeudi, d'une souris: le «démantèlement» des colonies juives implantées dans les territoires palestiniens. En réalité, Sharon n'a rien avancé de nouveau dans son discours, susceptible de détendre l'atmosphère d'une part, apporter des éléments inédits à même de relancer sérieusement les discussions entre les deux parties, d'autre part. Le chef du gouvernement israélien n'a en l'occurrence fait aucune proposition nouvelle, mais s'est attelé, pour ne point changer à menacer les Palestiniens, dans les six mois à venir, d'une «séparation» unilatérale. La bonne affaire ! De quelle séparation parle donc M.Sharon, alors que la communauté internationale attend d'Israël un véritable désengagement des territoires palestiniens, occupés depuis 1967, et le retour d'Israël à la ligne verte d'armistice de 1948. Ne serait-ce que pour la clarté de la problématique proche-orientale et la compréhension du dossier israélo-palestinien, il fallait, d'une manière ou d'une autre, replacer le contentieux dans son cadre réel de lutte de libération contre la colonisation et pour l'indépendance du peuple palestinien. Israël occupe, actuellement, la totalité des territoires palestiniens - y compris les villes autonomes issues de l'accord d'Oslo de 1993 - avec comme conséquence première, l'implantation de centaines de nouvelles colonies juives de peuplement. Celles considérées comme illégales qui se sont établies sans l'aval de l'administration, et celle dites «isolées» au sein de la population palestinienne? De quel démantèlement parle Sharon lorsqu'il songe à annexer les territoires palestiniens sur lesquels sont érigées les colonies construites depuis 1967? En fait, dans son discours, Sharon ne dit rien d'autre que de ce qu'il a toujours affirmé, ne remettant à aucun moment en cause, l'idéologie qui a fondé l'occupation et l'expansion israélienne dans les territoires palestiniens. Sharon affirme «Cela m'est très pénible de nous séparer de colonies, mais il faut déployer tous les efforts possibles afin de parvenir à la paix, et il y a un prix à payer». Un prix que, bien sûr, il fixe lui-même. Or, l'argumentation de M.Sharon est plutôt spécieuse dans la mesure où il veut la sécurité d'Israël sans céder sur l'essentiel, la paix contre la terre, rendant même aléatoire l'émergence de l'Etat palestinien prévu par la feuille de route (le plan de paix international) privant ainsi le peuple palestinien de réaliser le rêve de fonder son Etat indépendant. L'initiative du chef du gouvernement israélien a, en fait, embarrassé tout le monde à commencer par ses mentors américains, dont la réaction, vendredi, a été plus que mitigée comme l'atteste la déclaration du porte-parole de la Maison-Blanche, Scott McClellann, selon lequel «Les Etats-Unis estiment qu'un règlement doit être négocié et nous nous opposons à tout effort, tout effort israélien, (tient-il à souligner) pour imposer un règlement». Et c'est précisément ce que tente de faire Sharon: imposer un règlement israélien au contentieux israélo-palestinien. Or, la nuit portant conseil, et plus vraisemblablement la pression du lobby pro-israélien à Washington ayant fait son oeuvre, (à quelques mois de la présidentielle américaine, les voix coûtent cher), la Maison-Blanche, par la voix du même porte-parole cité plus haut, rectifie le tir déclarant: «Nous sommes très satisfaits du discours d'ensemble du Premier ministre Sharon.» Le président Bush, indique-t-on de sources proches de la Maison-Blanche reste «attaché à sa vision de deux Etats (Israël et Palestine) et la feuille de route est le meilleur moyen d'y parvenir». Certes ! Encore faut-il que les Israéliens se conforment tant à l'esprit qu'à la lettre du plan de paix international.