Pour la première fois, un haut responsable algérien admet que ce parti a gagné en 1997 grâce à la fraude. Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, M.Zerhouni, a reconnu, dans son intervention hier, devant les députés lors des débats sur la proposition de la loi amendant l'actuel texte organique relatif au régime électoral, que les législatives de 1997 remportées par le RND ont été bel et bien fraudées. Il a dans ce sens indiqué que «la proposition d'amendement n'est pas en contradiction avec le déroulement des dernières élections». Il ajoute ceci : «Les élections de 2002 ont permis de rendre la crédibilité à cette assemblée.» «Une crédibilité» retrouvée selon M. Zerhouni grâce aux instructions du président qui a tenu à ce que cette échéance se déroule dans une transparence totale. Cette sortie a été jugée pour le moins curieuse par des députés ne comprenant pas comment un ministre réputé proche de Bouteflika se permet de provoquer le seul parti qui soutienne un second mandat de son président. Concernant le texte en débat, il a tenu à soulever des réserves sur deux projets contenus dans la proposition, à savoir la remise des listes électorales et le vote dans les bureaux spéciaux. Pour le premier point, il précisera que «l'actuelle loi électorale autorise les représentants des partis et les candidats à prendre connaissance de la liste», ajoutant que «cette même loi suffit pour identifier les lacunes». Par ailleurs il affirme que la remise des listes et leur impression «peut être contraire à la Constitution et à certaines des dispositions relatives aux libertés individuelles» sachant que cette loi révèle beaucoup d'informations sur les électeurs inscrits ce qui pourrait poser, selon lui, des problèmes de sécurité des personnes. Quant aux bureaux spéciaux, le ministre a réaffirmé que le «gouvernement ne voit aucun inconvénient à ce qu'ils soient maintenus ou suspendus». Ajoutant cependant «rien ne justifie» la suspension de ces derniers que les représentants des partis ont pu surveiller durant les dernières élections. Leur suspension réduirait la participation des membres de l'ANP et des corps de sécurité. Le ministre n'a pas manqué d'évoquer les conséquences de la réduction des bureaux itinérants lors des dernières élections législatives, entraînant ainsi l'abstention «d'un million et demi d'électeurs». Pour lui, «la suspension des bureaux spéciaux aura les mêmes conséquences». Cependant, le ministre de l'Intérieur a précisé que le gouvernement se soumettra à la décision de l'assemblée, affirmant par là même que «les prochaines élections seront intègres et crédibles». Après Zerhouni, c'était au tour des initiateurs de cet amendement d'intervenir, à leur tête bien évidemment le mouvement Islah. Ce dernier, et après avoir défendu ce projet, a exigé que soit rendu public le rapport de la commission d'enquête parlementaire mise en place après les législatives de 1997. Un deuxième coup dur pour la formation d'Ouyahia. Les députés du RND, restés calmes jusque-là, décident de réagir en quittant bruyamment l'hémicycle en guise de protestation. Quelques minutes plus tard, ces derniers regagnent la salle et demandent la levée de la séance pour la réunion des chefs des groupes parlementaires. La séance a repris un quart d'heure après, pour l'adoption de la proposition sur la mise sur pied d'une commission d'enquête parlementaire concernant le refus d'agrément du Cnapest et du CLA. Interrogé par nos soins, le porte-parole du RND a précisé que le retrait de son parti était dû au non-respect de l'ordre du jour par le président de l'APN. «Les déclarations de Zerhouni et du député d'El-Islah ne nous ont pas intimidés», précise-t-il Avant d'ajouter que le RND a lui aussi soulevé des réserves sur le déroulement des élections législatives de 2001. «Il est étonnant que ceux qui ont applaudi la fraude en 2002 demandent plus de garantie pour la présidentielle à venir.»