Une proposition de retarder le sommet au 8 janvier a été refusée par l'Algérie. Le sommet de l'Union du Maghreb arabe (UMA), dont la tenue était prévue aujourd'hui et demain au Palais des nations, a été reporté hier sine die à la demande de la Libye. L'Algérie s'est opposée à ce qu'il soit retardé de deux semaines, a indiqué hier le ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem. La proposition du report a émané du ministre libyen des Affaires étrangères, Abderrahmane Chelgham, qui a avancé la date du 6 janvier pour ce sommet. Ce report qui n'a, du reste, surpris personne, au vu du niveau de représentation du Maroc, de la défection de la Mauritanie et de l'improbabilité de la présence du dirigeant libyen à Alger, a déteint sur l'ambiance qui prévalait hier à l'hôtel Sheraton. En effet, après un week-end quelque peu exaltant, les officiels des cinq pays n'arrivaient pas à masquer leur pessimisme quant à la tenue de la rencontre au sommet. Quand la nouvelle du report est tombée, c'était carrément la consternation au sein des délégations d'experts, notamment chez les Algériens dont certains n'ont pu réprimer des réflexions sur l'irresponsabilité du roi marocain et de son ministre des Affaires étrangères. «Un travail de plusieurs mois qui est réduit à néant», dira l'un d'eux. Et à son confrère de poursuivre: «Des dizaines de millions de Maghrébins vont payer pour les inconséquences d'un roi immature.» Ces propos, tenus sous le couvert de l'anonymat pour des raisons diplomatiques évidentes, témoignent de l'importance du coup porté par le Maroc à la stabilité de la région. C'est la deuxième fois en moins de deux ans qu'une telle demande est introduite par le même pays, avec la différence cette fois, c'est que l'Algérie, après avoir présidé aux destinées de l'Union depuis 1994, passe le flambeau à la Libye, ce qui constitue une entrave aux règlements de l'UMA qui stipulent entre autres que la présidence tournante ne s'exerce qu'à l'issue d'un sommet des cinq nations. C'est ainsi que l'UMA se retrouve dans une situation sans précédent en violation totale de ses statuts. En fait, après l'échec de la deuxième tentative de réunir les chefs d'Etat en juin 2002, il a été question du transfert de la présidence à la Libye. Une démarche qui a essuyé le refus catégorique de Maâmar Kadhafi. Il semble que devant l'attitude irresponsable du Maroc, les cinq membres de l'Union aient décidé de «faire avancer les choses», quitte pour cela à piétiner l'un des principes qui fondent cette organisation régionale. Cela dit, ce précédent ouvre la voie à d'innombrables hypothèses. En effet, les observateurs de la scène maghrébine traduisent la passation de la présidence de l'UMA à la Libye comme une volonté de la part des cinq pays de sortir l'Union de la dualité Maroc-Algérie imposée par le royaume chérifien. Cependant, sachant l'attachement quasi maladif du Maroc à la question sahraouie ne milite pas pour une sortie de crise. En fait, les dirigeants de l'UMA n'ont fait que reporter le problème au lieu de crever l'abcès une bonne fois pour toutes. L'autre hypothèse retenue par les mêmes observateurs a trait au fait qu'avec ce troisième échec, c'est tout l'édifice qui s'est écroulé définitivement.