Le capitaine malien Amadou Haya Sanogo est sorti de l'ombre à la faveur du coup d'Etat ayant renversé le président Amadou Toumani Touré (ATT) le 22 mars, qui lui a permis d'asseoir son influence sur la vie politique et militaire au Mali. Il se dépeint lui-même comme le «de Gaulle» de son pays. «Le président Amadou Toumani Touré a été pour le Mali ce que le maréchal Pétain a été pour la France en 1940 et je n'ai été pour le Mali que ce que de Gaulle a été pour la France», a estimé ce quadragénaire dans une tribune publiée le 25 octobre par le quotidien français Le Monde. Au moment de l'invasion allemande de la France, Philippe Pétain s'était opposé à la poursuite d'une guerre puis avait signé l'armistice avec l'Allemagne d'Adolf Hitler, tandis que Charles de Gaulle avait organisé les forces armées françaises de la résistance, avant de devenir, après guerre, chef du gouvernement puis président de la République. Deux semaines après le putsch qui a précipité la chute du nord du Mali aux mains de groupes armés, en particulier des islamistes, Amadou Haya Sanogo a signé un accord avec les médiateurs de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) par lequel il a accepté de rendre le pouvoir aux civils. Un retrait de façade, car cet homme qui a établi son quartier général dans le camp militaire de Kati, près de Bamako, s'est ensuite comporté comme s'il était toujours le véritable maître de la capitale, au détriment du président par intérim Dioncounda Traoré. Les hommes de Sanogo ont procédé à de nombreuses arrestations dans les milieux politiques, économiques, médiatiques et militaires, proches de l'ex-président Touré ou considérés comme tel. Comme ils ont arrêté le Premier ministre Cheick Modibo Diarra, qui a ensuite annoncé hier à l'aube sa démission et celle de son gouvernement. Les putschistes ont bénéficié d'une amnistie générale, votée en mai par les députés. Le même mois, Sanogo lui-même a obtenu le statut d'ancien chef d'Etat avec tous les avantages dus à ce rang, en vertu d'un accord entre l'ex-junte et la médiation de la Cédéao pour débloquer la situation politique. Mais face au blocage persistant, la Cédéao lui a retiré fin juin ce statut, ce qui n'a pas empêché le président intérimaire Dioncounda Traoré de le nommer en août président d'un comité de réforme de l'armée. Depuis, ce natif de Ségou (sud), rejette critiques et interrogations sur le rôle du coup d'Etat dans la partition du Mali. «Si on devait me tenir responsable de ce qui est arrivé avec le putsch, c'est comme si on attribuait la débâcle de juin 1940 en France à de Gaulle», a-t-il soutenu en septembre dans un débat radiophonique, se disant prêt à se battre «jusqu'au dernier soupir pour libérer» le Mali. Il dispensait des cours d'anglais au Prytanée militaire de Kati, école où il a été formé. Il a souvent été vu portant sur son uniforme un badge des Marines américains, rappel de ses séjours aux Etats-Unis où il a participé à des programmes de formation, notamment comme professeur d'anglais.