Le Chef de l'Etat aura réussi le pari d'acquérir des soutiens au sein même du fief du FLN. Entre indifférence et motion de soutien, la visite de travail et d'inspection que vient d'effectuer le président de la République dans les wilayas de Jijel et de Mila aura connu des hauts et des bas. En effet, autant les motions de soutien des autorités locales, des associations et des comités de soutien ne cessaient de pleuvoir à l'image de la pluie qui s'est abattue sur la région, autant l'accueil réservé par la population aura été plus froid que le temps qui a sévi sur la région, notamment à Jijel-ville et ses environs. En fait, la visite du chef de l'Etat dans ces deux wilayas ne devra pas apporter de grands changements dans le vécu des populations en dépit des sommes faramineuses distribuées dans le cadre du programme de développement complémentaire. Sur le plan purement politique le président de la République peut s'estimer heureux d'avoir gagné son pari non pas pour avoir su drainer les grandes foules mais pour avoir arraché des soutiens au sein même du fief du FLN dont les élus ont boycotté la visite en se retirant du comité d'accueil pour protester contre l'invalidation du 8e congrès du parti sur «instrumentalisation de la justice», selon leurs propos. Cette victoire du président est d'autant acquise dans un contexte politique local particulier où le scrutin des sénatoriales s'est soldé par la victoire du candidat FLN dirigé par Ali Benflis sur le candidat du RND. En outre, le chef de l'Etat a mis à profit cette sortie sur le terrain pour faire l'apologie de son programme en mettant en avant son désir de voir tous les Algériens et en particulier les religieux agir dans le sens de «la promotion de la concorde civile en une véritable réconciliation nationale». En effet, c'est dans l'un des anciens bastions du terrorisme et fief de l'Armée islamique du salut (AIS) que Abdelaziz Bouteflika a réitéré son appel à la réconciliation nationale, pivot de son engagement politique depuis son élection, lors du deuxième jour de sa visite de travail et d'inspection dans la wilaya de Jijel. «Je m'accroche à la concorde civile et je tiens plus que jamais à la réconciliation nationale», a déclaré Abdelaziz Bouteflika lors de l'inauguration la nouvelle école coranique de la daïra d'El-Milia, à Jijel. Pourtant cette dernière veut plus que les paroles de chimères du fait que la population attendait autre chose que des considérations politiques et électoralistes. Because Jijel a vécu ses dernières années dans des conditions sécuritaires des plus difficiles avec son lot de retard dans le développement lié à l'exode massif des populations rurales vers des cieux plus cléments. En outre, il y a l'absence d'investissement productif suivi de l'abandon d'activités agricoles en zones rurales, la saturation des équipements socioéducatifs, l'augmentation du chômage, la prolifération de constructions illicites et la dégradation du cadre de vie. D'ailleurs, l'enveloppe budgétaire complémentaire allouée (531 milliards de centimes) dans le cadre du programme de relance économique est jugée dérisoire par la population en raison du déficit considérable en infrastructures, un taux de chômage dépassant les 39 % de la population active qui ont fait que la région accuse un retard très important en matière de développement économique et social. Pourtant, de coûteux projets avaient été lancés par l'administration locale sans que la wilaya puisse réellement en tirer bénéfice. La problématique zone franche de Bellara à l'état de pâturage fermé, le projet de remise en activité du port de Djendjen, la réalisation du barrage de Kissir, l'état des infrastructures routières, le manque de logements sont autant de points noirs pour la population qui ne comprend pas la «mauvaise» gestion des finances publiques locales. La wilaya malgré son fort potentiel semble avoir été brisée autant par la mauvaise gestion que par plus de dix années de terrorisme. Ce sont à tous ces problèmes qu'il faudra trouver des solutions dans les plus brefs délais pour qu'un candidat à la magistrature suprême puisse espérer gagner l'estime d'une population désoeuvrée et qui ne croit plus aux promesses électoralistes. Le même constat a été relevé dans la wilaya de Mila, jadis appelée «royaume du blé et du lait». En effet, en dépit d'atouts économiques nombreux, de multiples richesses naturelles et des potentialités en matière de tourisme de montagne, Mila n'a connu aucun essor économique depuis qu'elle a été élevée au rang de wilaya. Est-ce à dire que le président de la République ne jouit pas d'une grande popularité au sein de la population? Oh que non ! Bien au contraire, la masse populaire qui estime qu'il mérite «qu'on lui fasse confiance pour un second mandat».