Barack Obama et Benjamin Netanyahu sont comme chien et chat, le processus de paix israélo-palestinien est dans le coma, alors pourquoi le président américain choisit-il d'aller en Israël pour le premier voyage de son nouveau mandat? Avec la préférence affichée par le Premier ministre israélien pour le républicain Mitt Romney lors de l'élection américaine, le rejet israélien jusqu'ici des efforts de Barack Obama en faveur du processus de paix ou encore la volonté palestinienne de chercher la reconnaissance d'un Etat par l'ONU qui a embarrassé l'administration américaine, le risque de voir le président américain rentrer de ce voyage les mains vides semble élevé. Mais la situation politique a changé et les cartes ont été rebattues après les élections américaines et israéliennes et les deux pays sont confrontés à des crises communes avec le chaos en Syrie, les soubresauts en Egypte et le programme nucléaire controversé en Iran. La poussée de la formation centriste Yesh Atid en Israël, l'arrivée du nouveau secrétaire d'Etat John Kerry et l'annonce demain du voyage de Barack Obama au printemps en Israël, dans les territoires palestiniens et en Jordanie soulèvent un certain optimisme quant à la possibilité d'une initiative américaine pour relancer le processus de paix. Mais échaudée par son échec lors du premier mandat, la Maison-Blanche s'est rapidement attelée à réfréner les attentes, préférant voir dans ce voyage l'opportunité de coordonner les positions des deux pays sur les problèmes communs. Ce déplacement intervient en début de mandat de Barack Obama, c'est-à-dire à l'apogée de sa popularité. «C'est mieux d'y aller au début du mandat plutôt que dans trois ou quatre ans quand vous voyez la porte de sortie» fait valoir un haut responsable américain. L'annonce du voyage permet également de couper l'herbe sous le pied des républicains prompts à dénoncer le fait que Barack Obama ne s'est toujours pas rendu en Israël comme président et de montrer à des pays comme l'Iran, qu'en dépit de la relation difficile entre Obama et Netanyahu, l'alliance américano-israélienne est inébranlable. Pour Bruce Jentleson, professeur à la Duke University et ancien haut responsable du département d'Etat, les voyages présidentiels ne servent pas qu'à cocher des cases. «Si vous regardez les voyages effectués par le président lors de son premier mandat, la Chine par exemple, il s'agissait de faire avancer les relations», plaide-t-il. La visite en Chine avait permis aux Américains de s'insérer dans la nouvelle stratégie de pivot vers l'Asie-Pacifique. Celui au Moyen-Orient permettra de démontrer que la région demeure une priorité pour l'administration américaine. Les démocrates savourent également le fait que lors de la campagne, Mitt Romney, qui avait promis de faire son premier déplacement en Israël comme président, avait accusé Barack Obama de «jeter Israël sous un bus»: c'est le démocrate qui fera ce voyage. La Maison Blanche ne perd pas de vue non plus que Benjamin Netanyahu est dans une position plus faible qu'avant les élections américaines et israéliennes. Washington se satisferait d'une coalition gouvernementale qui repose moins sur les partis juifs ultra-orthodoxes. Malgré leur mésentente, les deux responsables sont de fins politiques et, face aux menaces communes, pourraient bien s'accorder pour laisser une trace dans l'histoire.