Le Makhzen a décidé de faire taire les voix qui se battent pour plus de justice et de droit. Des voix qui se sont surtout élevées pour vivre libre dans un Sahara occidental indépendant. La machine judiciaire marocaine s'est mise en marche. Elle risque de s'emballer. Les détenus civils sahraouis détenus depuis 27 mois à la prison locale de Salé, ville jumelle de Rabat, risquent gros comparaissant depuis vendredi devant un tribunal militaire. Vont-ils être broyés? Poursuivis pour «constitution de bandes criminelles, violences sur des forces de l'ordre ayant entraîné la mort avec préméditation et mutilation de cadavres», après le démantèlement du camp de Gdeim Izik, le 8 novembre 2010, ils risquent la peine de mort. Si ces chefs d'inculpation sont retenus contre eux par leurs juges, il ne fait nul doute que le verdict sera lourd. Très lourd. Les accusés jouent pratiquement leurs têtes.«Le procès de civils devant un tribunal militaire ne répond pas aux normes internationalement reconnues d'un procès équitable. Les 24 accusés doivent être traduits devant un tribunal civil avec toutes les garanties des droits de l'homme que cela suppose et, en aucun cas, les détenus ne doivent être condamnés à mort», avait déclaré Philip Luther, directeur d'Amnesty International au Moyen-Orient et Afrique du Nord, qui a conseillé, dans la foulée, aux autorités marocaines d'ouvrir une «enquête indépendante et impartiale sur les événements de Gdeim Izik qui ont eu lieu il y a plus de deux ans (novembre 2010, Ndlr)». Leur comparution devant une telle juridiction «ne répond pas aux normes internationalement reconnues d'un procès équitable» a affirmé l'ONG américaine de défense des droits de l'homme Amnesty International qui a fait remarquer que «la plupart des accusés ont déclaré qu'ils avaient été torturés et maltraités au cours de leurs deux années de détention provisoire, certains auraient été contraints de signer des déclarations». Epinglé à maintes reprises par les organisations de défense des droits de l'homme pour usage de la torture afin de soutirer des aveux, le pouvoir marocain fait la sourde oreille. Incorrigible, il continue sa marche en avant. Il fonce. Une démarche aveugle qui s'apparente à l'assaut lancé par ses forces de répression contre le camp de Gdeim Izik pour réprimer dans le sang une contestation à caractère hautement pacifique. Faire taire des voix qui se battent pour plus de justice et de droit. Des voix qui se sont surtout élevées pour vivre libre dans un Sahara occidental indépendant. Les 24 détenus sahraouis portent ce cri dans l'enceinte des institutions marocaines. «Nous ne sommes pas des criminels, mais des prisonniers politiques et nous considérons notre comparution devant ce tribunal militaire comme un procès politique», a clamé Ennaâma Asfari, premier prévenu à prendre la parole. Le camp de Gdeim Izik était «une bataille de protestation pacifique...une forme de contestation politique symbolique par lesquelles nous réclamions les droits des Sahraouis» a-t-il tenu à préciser. Le Maroc qui ne jure que par son projet d'autonomie reste sourd à toute voix dissonante. Lâchera t-il ses «proies» sous la pression internationale? La présence d'observateurs européens, pour la plupart des magistrats, avocats et militants des droits de l'homme qui assistent au procès, des 24 Sahraouis, peut faire pencher la balance...