L'esprit de sacrifice, le nationalisme et les vertus qu'incarnaient les héros de la guerre de Libération sont-ils devenus des slogans creux aux yeux des Algériens? Selon de nombreux chercheurs qui se sont penchés sur la question, les Algériens ont beaucoup changé depuis 1962 et se sont départis complètement de la voie tracée par leurs glorieux aînés qui n'ont pas hésité à recourir au sacrifice suprême afin que l'Algérie recouvre sa liberté et son indépendance. Intervenant, hier, à l'occasion du forum organisé par le journal El Moudjahid, en collaboration avec l'association «Mechaal Echahid», Mohamed Arezki Ferrad, écrivain et fils de chahid, a donné une conférence sur le thème «les martyrs de la révolution et l'esprit de sacrifice et les vertus qu'ils incarnaient». Soulignant que plus de cinq millions d'Algériens sont morts entre 1830 et 1962, victimes de la barbarie coloniale, le conférencier s'insurge contre tous ceux qui vantent le passé glorieux de la France coloniale et passent sous silence tous les crimes et génocides qu'elle a commis en Algérie durant cette période. «A-t-on instruit nos enfants et leur a-t-on inculqué l'esprit de sacrifice et les valeurs qu'incarnaient les hommes de Novembre?», s'est il interrogé. Se disant très choqué par la réaction de certains Algériens et par leur méconnaissance de l'histoire, et surtout des exploits et des sacrifices de ceux qui avaient pris les armes pour chasser la France coloniale, l'hôte du forum a lancé un appel pressant en direction des jeunes, notamment, afin qu'ils s'inspirent de l'exemple des héros de la révolution. «La patrie, c'est sacré. Si l'on veut construire le pays et apprendre aux jeunes à mieux l'aimer, on doit impérativement changer de politique et de discours, en inculquant à nos jeunes l'esprit de sacrifice et les idéaux de Novembre», a- t'il confié. M.Ferrad a fait part, ensuite, des nombreux problèmes auxquels se heurtent, depuis l'indépendance, les femmes et les fils de chouhada. «Cette frange de la société a beaucoup souffert et n'est pas reconnue à sa juste valeur», a- t'il affirmé. Selon lui, l'Algérie a réalisé des progrès prodigieux de 1962 à ce jour, notamment dans le domaine de l'enseignement et de la construction et qu'elle possède les potentialités nécessaires pour progresser et se développer. Hôte, lui aussi, du forum, le docteur Salim Kelala a axé l'essentiel de son intervention sur la femme et le rôle qu'elle a joué pendant et après la révolution. «Les femmes algériennes ont contribué grandement à la lutte de Libération nationale, particulièrement les femmes de moudjahidine. Malheureusement, ces dernières n'ont pas été prises correctement en charge à la mort de leurs maris.», a- t'il déclaré. «Après la mort de mon père, c'est ma mère qui a pris la relève et qui m'a élevé. C'est même elle qui a construit notre maison et s'est chargée de notre éducation. Certes, l'Etat nous a aidés, mais l'aide qu'il nous a accordée est insuffisante pour pouvoir subvenir à tous nos besoins.».