La lecture du document par Abbas Mekhalif a été un véritable réquisitoire contre Bouteflika. Dans un document remis hier, à la presse où sont consignées «les violations de la Constitution commises par le président de la République», les parlementaires du FLN ont implicitement accusé le président de la République de haute trahison. Ces graves révélations sans précédent dans l'histoire du parlement algérien interviennent dans un climat électrique impulsé par le cumul d'une crise qui dure depuis plus de neuf mois. Le document clôt également deux semaines d'intenses protestations au sein de l'hémicycle. Ces protestations ont connu leur apogée hier, à l'occasion de la clôture de la session d'automne de l'APN, quand les députés du FLN ont improvisé une marche dans l'enceinte du siège de l'APN. «Nous annonçons la suspension du sit-in illimité que nous avons organisé, mais une cellule de crise est installée pour suivre l'évolution de la situation et réagir au moment opportun», a déclaré le chef du groupe parlementaire, Abbas Mekhalif, lors du point de presse qu'il a organisé au siège de son groupe au parlement. La lecture du document par Abbas Mekhalif, entouré d'une centaine de députés, a été un véritable réquisitoire contre M.Bouteflika. «Le président de la République, aussitôt après avoir prêté serment, le 27 avril 1999, de défendre la Constitution, s'est empressé de déclarer et de démontrer qu'il s'en accommode mal», a-t-il dit avant d'énumérer les différentes violations réparties en quatre chapitres : la défense de la Constitution qui figure en tête des engagements du président. «Six mois seulement après son installation à la tête de l'institution exécutive, le chef de l'Etat s'est empressé, dès le 27 octobre, de prendre un décret présidentiel par lequel il s'attribue le monopole du pouvoir de nominations à tous les emplois publics, alors que c'est une attribution du chef du gouvernement», la grâce amnistiante «qui est un domaine réservé à la loi», le relèvement des salaires «où il estime tirer des dividendes de sympathie», «l'instrumentalisation éhontée de la justice», sont également citées dans ce premier chapitre. L'engagement à réunir les conditions nécessaires au fonctionnement normal des institutions et de l'ordre constitutionnel, un autre chapitre où «le président de la République a failli». A ce sujet, le document cite le domaine législatif réservé d'ordinaire au parlement mais où M.Bouteflika «fait un usage abusif frisant le détournement de pouvoir, en légiférant par ordonnances sur des textes sensibles engageant le pays dans des choix socio-économiques déterminants pour son avenir». C'est l'engagement du président au respect des institutions de la République qui constitue le troisième chapitre du «réquisitoire». La gestion du Conseil constitutionnel et «le putsch contre son ex-président Boumaza», l'ignorance affichée envers les élus du peuple «puisqu'il ne s'est jamais adressé au parlement» résume, selon le même document, l' attitude du chef de l'Etat à l'égard des institutions «qui s'apparente au mieux à de la légèreté, au pire à du mépris». Enfin, le dernier chapitre a porté sur le renforcement du processus démocratique. Le groupe parlementaire du FLN souligne, dans son document, «le silence du président face aux violations du principe de l'impartialité de l'administration et aux atteintes à l'indépendance de la justice». Par ailleurs, il est rappelé, dans le document, la nécessité d'instaurer une haute cour de l'Etat telle que stipulée dans la Constitution.