Le dignitaire irakien, reclus dans la ville de Najaf, a été victime, jeudi, d'une tentative d'assassinat. L'homme le mieux protégé d'Irak, le grand ayatollah Ali Sistani, reclus dans la ville sainte de Najaf, a échappé jeudi à une tentative d'assassinat, indiquent plusieurs sources, au moment où la mission des Nations unies, sollicitée par les chiites, était attendue (hier) à Bagdad. La tentative d'assassinat a bien été confirmée, toutefois, personne ne semblait en mesure, hier, d'expliquer les circonstances dans lesquelles celle-ci a été menée. Peu prolixe, un responsable de la sécurité rapprochée du dignitaire chiite s'est contenté de dire que «Sayyed Sistani a échappé jeudi à une tentative d'assassinat à Najaf» sans autre précision. Un religieux membre de l'entourage d'Ali Sistani a indiqué pour sa part qu'«une personne a essayé d'entrer dans le bureau du Sayyed Sistani afin de perpétrer un acte criminel le visant, mais ses gardes ont fait échouer cette tentative». Là également le religieux reste muet sur les circonstances de «l'incident». Jeudi, c'était la stupeur parmi les Irakiens encore sous le choc du double attentat d'Erbil, le plus meurtrier, avec 101 morts, depuis la chute du régime de Saddam Hussein. Un membre du Conseil transitoire de gouvernement, le chiite Mouaffak Al-Roubai, a déclaré à la presse que «les mains qui ont frappé les Nations unies, Hakim (l'ayatollah Mohamed Baqer Al-Hakim), le Cicr et Erbil sont les mêmes qui tentent de semer la sédition confessionnelle et ethnique en Irak», ajoutant: «Je viens de rencontrer Sayyed Sistani, qui est sain et sauf.» En fait, outre les attentats cités par M.Al-Roubai, il y a lieu de noter que plusieurs personnalités politiques et religieuses irakiennes ont été assassinées ou ont fait l'objet de tentatives d'assassinat ces derniers mois. Avec la disparition brutale en août dernier de l'ayatollah Mohamed Baqer Al-Hakim - leader spirituel des chiites irakiens qui est revenu quelques semaines plus tôt de son exil iranien - le grand ayatollah Ali Sistani est devenu la plus grande autorité religieuse chiite et la personnalité la plus influente en Irak. Cela a induit le fait que Najaf est devenue pour tous ceux qui sont préoccupés de près ou de loin par l'avenir de l'Irak le passage obligé pour y rencontrer le grand homme. Ali Sistani s'est fait remarquer ces dernières semaines par son opposition absolue à la désignation de l'assemblée provisoire devant travailler à la mise au point de la future Constitution du pays, exigeant que cette assemblée soit élue au suffrage universel. Il a fini cependant par tran-siger en acceptant que l'ONU donne un avis sur la faisabilité dans les temps impartis, au plus tard le 30 juin prochain, d'élections directes. C'est la veille de l'arrivée de la mission d'évaluation envoyée par le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, que l'ayatollah Sistani a été l'objet de la tentative d'assassinat. La multiplication des assassinats ciblés - à Erbil une dizaine de hauts responsables des deux principaux partis kurdes ( PDK et UPK) ont été tués - comme celle de jeudi contre l'ayatollah Sistani indique à l'évidence que la situation sécuritaire est loin d'être sous contrôle comme l'affirment certains responsables militaires de la coalition. Au plan politique, le Conseil de transition du gouvernement irakien tente de trouver un compromis entre l'exigence formulée par les chiites d'élections directes et la désignation des mem-bres de l'assemblée privilégiée par les Etats-Unis. M.Al-Roubai a indiqué à ce propos que «notre accord du 15 novembre avec la coalition est toujours valable et nous tentons de concilier cet accord et la tenue d'élections générales demandées par la Marjaïya (direction religieuse chiite)». Les Américains, réticents à tout changement, laissent toutefois une porte entrouverte «en fonction des commentaires de l'ONU et de ce qu'elle considèrent comme le mieux», indique un porte-parole du département d'Etat.