Les sinistrés du séisme du 21 mai dernier ont réoccupé la rue, hier matin. Ils étaient près de 500 personnes dont les sinistrés de la cité HLM et de la cité Oasis à faire éclater leur colère en posant des barricades et en allumant des pneus au milieu de la chaussée, bloquant ainsi la RN 12 reliant Tizi Ouzou à Alger. Les protestataires évoquent, pour les uns, l'exiguïté des chalets pour les familles algériennes, généralement nombreuses et, pour beaucoup d'autres, soit leur relogement qui tarde à venir, soit la non-perception des aides accordées par l'Etat. Selon les manifestants, «sur les 60 familles de la cité HLM, 15 seulement ont perçu ces indemnités». Pour tous, il s'agit là encore d'un dysfonctionnement. Ils ne sont pas rares ceux qui évoquent les passe-droits et autres «tchipa». Il y a près d'une semaine, une délégation de sinistrés s'était rendue aussi bien à l'APC qu'à la daïra. Sur place, ils ont donné un «ultimatum» de cinq jours aux responsables en les mettant en demeure d'accélérer au moins l'octroi des aides. Une fois le délai passé et qu'aucune réaction des autorités n'était en vue, les sinistrés sont passés aux actes. Hier donc, la RN 12 a été bloquée et les manifestants n'autorisaient à passer que les véhicules prioritaires: ambulances, pompiers, etc. Les autres véhicules étaient obligés de rebrousser chemin et de faire un détour pour pouvoir rentrer sur Tizi Ouzou. Présents sur les lieux, les CNS observaient de loin la scène et semblaient ne pas vouloir intervenir afin de ne pas «verser de l'huile sur le feu». Il faut dire que la ville de Bordj Ménaïel a grandement souffert lors du séisme. Plusieurs édifices dont le marché couvert et tous les immeubles de la grande rue, ainsi que des bâtiments, aussi bien à la cité Bousbaï qu'au niveau des HLM et dans d'autres quartiers s'étaient écroulés comme des châteaux de cartes. La ville a dénombré plusieurs victimes. L'hôpital de Bordj Ménaïel avec son personnel admirable en dévouement était renforcé par des unités mobiles de santé de l'ANP, pour faire face à la catastrophe. Aujourd'hui, les gravats déblayés, il ne reste que les stigmates profonds et difficiles à guérir. Comme les villes et villages de la wilaya de Boumerdès, Bordj Ménaïel émerge difficilement et doucement du cauchemar. Encore éperdus de douleur, après avoir perdu tous leurs biens et souvent des parents ou encore des enfants, les sinistrés de Bordj Ménaïel et d'ailleurs sont aujourd'hui des personnes traumatisées. Pour peu que ces aides promises par l'Etat n'arrivent pas au moment voulu, alors ils sont en droit de crier leur colère. Bordj Ménaïel est blessée, elle a perdu beaucoup de son sang, elle se relève péniblement d'un long cauchemar. Faut-il alors que l'aveugle bureaucratie en rajoute? Non, mille fois non ! Que tous se réveillent et que tous se disent qu'il y a là un devoir national et un devoir humain à accomplir. Par ce geste, anodin pour beaucoup, le sourire peut alors renaître chez un enfant. Quelle belle réussite!