La base islamiste tourne actuellement autour d'un électorat de 4 millions de voix. A deux mois de l'élection présidentielle d'avril 2004, les partis islamistes légaux restent partagés sur la position à prendre vis-à-vis de Bouteflika. Trois tendances se dégagent toutefois de ce qu'on peut appeler un «wait and see stratégique». Si le parti Nahda ne cache pas ses penchants pour un soutien massif de Abdelaziz Bouteflika, le MSP et le MRN adoptent une toute autre stratégie. Fort de ses succès précédents, le parti de Abdellah Djaballah affiche déjà ses prétentions d'être le nouveau chef de file des partis islamistes légaux, voire de tous les partis d'opposition et se range en bloc monolithique derrière son leader, qui se voit investi d'une nouvelle aura, depuis que le général de corps d'armée, Mohamed Lamari, avait déclaré lors d'un entretien accordé au périodique français Le Point, que «l'armée respecterait le choix du peuple, même si Abdellah Djaballah est élu». Le MRN qui a «mené en bateau» toute l'Assemblée, lors des débats houleux sur l'interdiction d'importation de boissons alcoolisées et le vote des militaires hors des casernes, a pu comptabiliser de précieux points et se pose réellement en champion de l'opposition islamiste «soft». Le MSP, depuis la disparition de Mahfoud Nahnah, connaît une période de décrue, malgré les «coups de nerfs» de son nouveau leader Bouguerra Soltani. Les piètres scores obtenus lors des législatives et lors des locales (communales et wilayales), l'ont poussé à revoir sa stratégie à la baisse et deux tendances se dégagent aujourd'hui peu à peu. La première, plus consistante, tend à appuyer le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, pour briguer un second mandat. Cette tendance semble être le camp de Bouguerra, qui, déjà a lancé ses associations caritatives et autres ramifications religieuses et sociales, en éclaireurs. L'exemple de l'Ujel, syndicat étudiant assez puissant, est à ce propos un parfait exemple. La seconde tendance, minoritaire, tend plutôt à appuyer un candidat proche du courant islamiste. Mais, connaissant les «traditions électorales» du MSP, fait d'un assemblage d'islamisme et de nationalisme, il est à attendre que la première tendance fasse florès. Nahda, parti complètement laminé par la création du MRN et les défections des principaux cadres, n'a d'autre choix que le soutien au président. Cela peut, à terme, éviter à ce petit parti à l'implantation régionale prononcée la disparition, et le faire bénéficier des retombées d'un tel appui, tout en maintenant le parti dans la droite ligne tracée par son précédent leader, Lahbib Adami, ligne faite de concessions et d'alliances. Voilà, en grandes lignes les tendances islamistes actuelles et leur position vis-à-vis de la présidentielle. Tournant autour de 4 millions de voix, l'électorat islamiste reste le plus pesant des électorats, mais il faudrait peut-être attendre le choix des leaders du parti dissous pour donner toute sa consistance à cet électorat, dont la quasi-totalité se trouve en dehors des partis islamistes légaux.