Le chef des services juridiques du gouvernement kenyan a désavoué hier la démarche de l'ambassadeur kenyan à l'ONU, demandant au Conseil de sécurité de faire cesser les poursuites engagées par la Cour pénale internationale (CPI) contre le président kenyan Uhuru Kenyatta et son vice-président William Ruto. Vendredi, l'avocat de M.Ruto avait déjà affirmé que le vice-président se dissociait de cette démarche. «Nous ne savions pas que la lettre avait été écrite à l'ONU. Nous n'étions pas au courant», a déclaré hier le procureur général du Kenya, Githu Muigai à la radio Capital FM. Le procureur général du Kenya (Attorney General) est le conseiller juridique en chef du gouvernement et a rang de ministre. «Le gouvernement du Kenya n'est pas partie aux procès devant la CPI. La position officielle du gouvernement kenyan est qu'il coopère pleinement avec la CPI et à l'intention de continuer à coopérer, dans le cadre du Statut de Rome (fondateur de la CPI) et du droit international», a poursuivi M.Muigai. Il s'est dit confiant que «les deux affaires seraient résolues rapidement, conformément au droit applicable». Vendredi, l'avocat de William Ruto, Karim Khan, avait également affirmé à Capital FM que son client «désirait se dissocier de la démarche de l'ambassadeur (kenyan à l'ONU) Macharia Kamau, car elle ne reflète pas sa volonté». M.Ruto «n'a jamais été consulté concernant l'élaboration de cette requête ou son envoi», avait ajouté Karim Khan. Le président Kenyatta ne s'est pas exprimé au sujet de cette lettre confidentielle, signée de l'ambassadeur kenyan à l'ONU et datée du 2 mai, dans laquelle le Kenya demande au Conseil de sécurité la «fin immédiate» des poursuites de MM.Kenyatta et Ruto pour crimes contre l'humanité devant la CPI. La démarche est juridiquement vouée à l'échec, le Statut de Rome ne permettant pas au Conseil de contraindre la CPI à abandonner définitivement des poursuites ou une enquête. Elle est néanmoins forte politiquement, d'une part car les autorités kenyanes - comme MM.Uhuru et Ruto, élus le 4 mars - s'étaient jusqu'ici toujours engagées à coopérer avec la CPI, d'autre part parce que la lettre appelle ouvertement les alliés du Kenya à faire pression sur la Cour. Le président et le vice-président kenyan sont poursuivis pour crimes contre l'humanité pour leur responsabilité présumée dans les terribles violences sur lesquelles avait débouché la précédente présidentielle, fin 2007, lors de laquelle ils appartenaient aux deux camps rivaux.