Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a révélé hier les noms de six suspects, dont un vice Premier ministre et un ministre, qu'il soupçonne d'être les principaux responsables de crimes contre l'humanité commis lors des violences post-électorales au Kenya fin 2007-début 2008. «A 11h58, le bureau du procureur a remis deux requêtes présentant ses conclusions suite aux informations recueillies au cours des derniers huit mois sur les atrocités commises au Kenya», a déclaré le procureur Luis Moreno-Ocampo, lors d'une conférence de presse La Haye. Il a annoncé avoir demandé aux juges de la CPI de délivrer des citations à comparaître à l'encontre des six personnes, dont le vice Premier ministre et ministre des Finances Uhuru Kenyatta, et le ministre suspendu de l'Education William Ruto, membres des deux principaux partis de la coalition gouvernementale kenyane. «Ceux-là sont les principaux responsables mais bien sûr, il y en a beaucoup d'autres», a souligné M.Moreno-Ocampo: «Nous nous concentrons sur les plus responsables». «Bien sûr, le Kenya peut décider d'en poursuivre davantage», a-t-il ajouté. Quelque 1200 personnes, selon l'accusation, avaient été tuées et plus de 300.000 déplacées lors de violences politico-ethniques qui avaient accompagné la réélection contestée du président Mwai Kibaki le 27 décembre 2007 face à son adversaire Raila Odinga, aujourd'hui Premier ministre du gouvernement de coalition. Le procureur a présenté aux juges deux dossiers distincts de crimes contre l'humanité. Le premier met en cause trois membres de l'ethnie kalenjin, dont deux responsables du Mouvement orange démocratique (ODM) de M.Odinga, William Ruto et le ministre de l'Industrialisation Henry Kosgey, ainsi que le directeur d'une station de radio locale, Joshua Arap Sang. Les trois hommes sont soupçonnés d'être les «principaux organisateurs et responsables» de crimes commis contre des partisans du Parti de l'unité nationale (PNU) du président Kibaki: meurtres, transferts forcés de population, persécutions basées sur l'appartenance politique et tortures. Le second dossier compte également trois suspects: deux responsables du PNU, le vice Premier ministre Uhuru Kenyatta et le chef des Services publics Francis Muthaura, soupçonnés de crimes contre des sympathisants de l'ODM, ainsi que l'ancien chef de la police, Hussein Ali. Les trois hommes sont soupçonnés de meurtres, transferts forcés de population, persécutions basées sur l'appartenance politique, viols et autres violences sexuelles ainsi que d'autres actes inhumains. M.Moreno-Ocampo avait été autorisé par les juges de la CPI le 31 mars à enquêter sur les crimes commis au Kenya après les élections de décembre 2007.