C'est l'hypothèse prédominante qui semble avoir fait son chemin au sein du groupe des dix. Mouloud Hamrouche, qui avait laissé planer le doute des jours durant sur sa décision finale, a fini par «lâcher» le morceau au cours d'une conférence de presse couverte par un imposant parterre de journalistes. Il s'avère, et même si le conférencier refuse de l'admettre explicitement, que toutes les décisions politiques prises dépendent d'une manière ou d'une autre de celle de l'institution militaire. A ce sujet, Hamrouche révèle que même la naissance du groupe des dix avait pour objectif primordial de confirmer le retrait véritable de l'armée du champ politique et les conséquences réelles qui devraient en résulter. Toujours est-il que Hamrouche, qui continue d'activer au sein du groupe, garde sa pleine autonomie en officialisant son retrait de la scène politique, argumentant cette décision par une somme de preuves. «Il est vrai que nous avons tous entendu le chef d'état major de l'ANP déclarer le retrait de l'armée du champ politique.» «L'annonce, ajoute-t-il, a été suivie par de nombreuses autres fuites, déclarations et analyses abondant toutes dans le même sens.» Or, il se trouve que jusqu'à aujourd'hui, «je me trouve dans l'incapacité de dire si cela est avéré ou pas». Convaincu que les toute prochaines semaines sauront apporter une réponse plausible à cette importante hypothèse, Hamrouche, non sans insistance, se contente d'émettre deux hypothèses. «Soit il y a eu remise en cause du retrait de l'armée du champ politique pour des raisons qui restent à définir, soit l'institution militaire a été neutralisée au profit de puissants groupes d'intérêt». Ces derniers, sans les nommer, seraient chapeautés par le chef de l'Etat. Hamrouche, qui semble pour le moment privilégier cette seconde hypothèse, la développe en quelque sorte pour dire que «ce retrait n'aurait jamais dû profiter à un quelconque groupe, mais à toute la population algérienne.» Le sphinx qu'a toujours été Hamrouche, ne s'exprimant que peu et par énigmes, donne l'air d'en savoir plus qu'il n'a voulu en dire, même s'il a promis vouloir répondre aux questionnements avec toute la clarté et la sincérité voulues. Cet ancien chef de gouvernement, père des grandes réformes démocratiques dans le pays, revendique haut et fort son passé de militaire, ajoutant garder des contacts entretenus avec l'état-major de l'ANP. Il aurait été tellement plus simple, donc, de poser la question à ces contacts privilégiés avant de convoquer cette conférence de presse. Une sortie médiatique qui, pour attendue qu'elle eut été, a posé plus de questions qu'elle n'a apporté de réponses. Cela paraît d'autant plausible, que Hamrouche a donné l'air d'émettre des doutes sur le sort futur du groupe des dix depuis que, lui, a cessé de caresser des rêves présidentiels immédiats: «Quel que soit le devenir de ce groupe, j'estime pour ma part, que sa mission est pleinement remplie, puisqu'il a servi à mettre en exergue et à prouver le coup de force électoral en train de se préparer». Cerise sur le gâteau dans ce charivari politico-électoraliste, en réponse à notre question sur ce qui a pu changer entre 1999 qui avait vu l'armée hisser quelqu'un au sommet du pouvoir et 2004, Hamrouche a éludé l'interrogation pour s'empeser sur le timing, assimilé à une maturité politique qui a permis à l'opposition de comprendre, 60 jours plus tôt, ce qu'elle n'avait saisi, en avril 1999 que la veille du scrutin. A savoir, que les jeux étaient et demeurent, toujours faits.