Si la rupture venait à être consommée, il serait difficile de préserver les apparences. Le premier à avoir songé à mettre un terme à cette alliance, vieille d'à peine deux mois, aura été Mouloud Hamrouche qui, en annonçant son retrait officiel de la course à la présidentielle, précisant que les jeux étaient faits, avait suggéré que «quel que soit le sort du groupe des dix, il aura accompli sa mission en dénonçant la fraude à temps et en mettant en exergue les preuves nécessaires». La sortie, ont pensé la plupart des observateurs de la scène politique nationale, annonçait en clair la rupture entre les membres du groupe des dix, ou à tout le moins entre les multiples tendances qui ont fini par le scinder en trois courants distincts. Toujours est-il, que l'opinion publique sera fixée sur le devenir de ce groupe lors de la rencontre de la dernière chance prévue aujourd'hui au siège de l'ANR. Lors de la dernière réunion, qui avait eu lieu mercredi passé à la permanence électorale du président du mouvement Wafa, Ahmed Taleb Ibrahimi, de vifs débats avaient eu lieu entre les présents. En somme, disent des sources proches du groupe, «la sortie de Hamrouche a précipité l'avènement quelque peu prématuré d'un débat qui n'aurait pu être éludé éternellement». Il y a des candidats qui refusent de se retirer tant qu'ils estiment possible aussi bien de se faire entendre de la part de l'opinion nationale et internationale, que d'arriver à peser assez pour que la souveraineté populaire soit un tant soit peu respectée. Outre les millions de sympathisants dont ils se revendiquent, ils comptent beaucoup sur les institutions nationales et internationales saisies afin d'amener le président-candidat à respecter ses engagements de tenir un scrutin démocratique et transparent. Ces candidats refusent de baisser les bras avant même que de s'être battus jusqu'aux limites du tolérable, histoire de ne pas décevoir leurs sympathisants. A côté de ce groupe, qui forme en somme l'essentiel et l'essence même des dix, il y a Mouloud Hamrouche qui a tenté de convaincre tout le monde de se retirer. Mais, force est de constater que son appel est demeuré sans écho, d'autant que les dix se trouvent dans l'incapacité de rééditer l'exploit de 1999 puisque Djaballah et Hanoune n'en font pas partie. Ce n'est pas tout. Les partisans de la participation à tout prix gardent de bonnes raisons de croire que la neutralité de l'armée n'est pas remise en cause, comme a tenté de le suggérer Hamrouche lors de sa tonitruante conférence de presse. Hamrouche, pour le moment, semble être isolé même si les heures à venir risquent de ne plus le laisser seul. Le troisième groupe, en effet, qui est formé par les candidats malheureux et ceux qui ne briguent pas le poste de président peuvent fort bien le rallier dans une logique de confrontation directe avec le chef de l'Etat et ses proches collaborateurs. Face à la naissance de l'alliance pro-Bouteflika le même jour et la même heure, le groupe des dix, qui se sait devenu une véritable institution depuis sa rencontre avec l'envoyé spécial de Bush et son mémorandum adressé aux institutions nationales et internationales, peut se fixer pour défi immédiat de surmonter cette crise afin de garder sa cohésion face aux multiples défis qui restent encore à relever. La survie des dix reste, comme de juste, la meilleure garantie pour le respect de la souveraineté populaire lors de la prochaine présidentielle.