L'ancien chef de gouvernement a estimé que la souveraineté du peuple est l'élément majeur de la démocratisation des institutions. Intervenant brièvement lors du colloque sur Ahmed Bey, Mouloud Hamrouche a bien choisi son point de départ pour arriver à un point de chute minutieusement calculé. «Je répondis à Si Hamdan: je ne suis pas seul dans le pays, et je ne puis traiter de ma seule autorité; je vais assembler les chefs de la ville et de la province, car mon habitude est de ne rien faire sans prendre leur avis.» Cette déclaration est écrite par Ahmed Bey en guise de réponse au duc de Rovigo, lui demandant de se rendre. Mouloud Hamrouche qualifie le comportement d'Ahmed Bey de hautement démocratique, «puisqu'il se réfère à la décision et à la souveraineté du peuple». Selon lui, «quand un pays est désorienté et en crise, il est souvent utile de retourner à l'histoire». Sa philosophie est claire: l'histoire est une géographie et la géographie est l'homme qui est, lui aussi, un acteur de l'histoire et une mémoire. Mais la mémoire de la nation algérienne, regrette-t-il, «ressemble à un vase cassé, dont les morceaux sont éparpillés un peu partout en Algérie et ailleurs». C'est ainsi que Mouloud Hamrouche abordait l'histoire algérienne, devant un important parterre d'universitaires et de chercheurs. Et de préciser dans le même sillage qu'«en dépit de la multitude d'approches et de lectures, l'histoire demeure unique. Mais le problème, sinon le danger, est de laisser les morceaux de la mémoire éparpillés et s'entredéchirer». L'orateur cite, en guise d'illustration, le différend engendré par la multitude des lectures au sujet des rapports entre Ahmed Bey et l'Emir Abd El Kader. Pour revenir à la «démocratie» du temps d'Ahmed Bey, Mouloud Hamrouche est catégorique: «Le peuple exerçait alors sa souveraineté, car les décisions d'Ahmed Bey sont issues essentiellement du peuple». Arrivera ensuite la souveraineté du peuple au temps de la guerre de Libération et l'exercice, au bout du compte, de son droit à l'autodétermination. Ainsi, Mouloud Hamrouche a fait un détour historique pour expliquer que «la souveraineté du peuple est l'élément majeur de la démocratisation des institutions». Aussi, interrogé, en marge du 2e Colloque national sur Ahmed Bey à Biskra, à propos de son initiative lancée avec Hocine Aït Ahmed et Abdelhamid Mehri, l'ex-bras droit de Chadli Bendjedid, estime qu'elle est suffisamment claire et directe et ne souffre d'aucune ambiguïté. Les trois hommes, pour mémoire, ont lancé un appel «à réfléchir ensemble aux fins d'éviter à l'Algérie un possible nouvel engrenage de la violence». Hamrouche, Mehri et Aït Ahmed ont appelé à la mise en place d'un processus «de démocratisation du pouvoir, de son exercice et de son contrôle» aux fins de garantir «la stabilité et l'espoir». Les trois chefs politiques, dans une déclaration finale rendue publique, ont soutenu que «toutes les composantes de la société s'impliqueraient et s'engageraient dans la concrétisation d'un tel processus.» Les trois alliés ont déclaré également être «disposés à apporter notre contribution à la recherche de solutions de sortie de crise dans toutes ses dimensions». 45 jours après le lancement de cette initiative, soit le 14 septembre dernier, un grain de sable semble gripper la machine. Interrogé à propos de l'état jugé stationnaire de leur alliance, Mouloud Hamrouche a estimé qu'il s'agissait d'un appel lancé à toutes les forces de la Nation «pour réfléchir ensemble à une solution à la crise.» «Il semble, néanmoins, que la crise est tellement profonde qu'ils ne savent pas comment réagir», a-t-il ajouté. Et de conclure qu'il est «impératif d'arrêter avec le transitoire et d'aller vers la transition pour instaurer la véritable autorité de l'Etat.»