Au moins 85 morts à Kerbala et 60 à Bagdad dans un double attentat au moment où les chiites célébraient le deuil de l'imam Hussein. Le deuil chiite commémorant l'imam Hussein en cette journée de l'Achoura a tourné à la tragédie pour les communautés chiites irakiennes et iraniennes (une cinquantaine de chiites iraniens figurent parmi les victimes) avec le double attentat commis dans la ville sainte de Kerbala et au mausolée chiite de l'imam Moussa Kazem à Bagdad. Une Achoura de sang où près d'une centaine de victimes ont été recensés à Kerbala et une soixantaine d'autres dans la capitale irakienne. Les blessés se compteraient par centaines, notamment à Kerbala où, outre les explosions parmi une foule compacte, des tirs de roquettes ont ciblé les pèlerins. En ce dixième jour de Moharem, qui correspondait pour la communauté chiite à l'assassinat en 680 de l'imam Hussein, était donc le jour du deuil observé à sa mémoire. Pour les chiites irakiens cette journée symbole était très importante dans la mesure où c'est la première fois, depuis trois décennies, que les chiites pouvaient officiellement célébrer l'un des rituels le plus signifiant de l'islam chiite. En effet, durant la dictature de Saddam Hussein, il était interdit aux chiites de commémorer le rituel du deuil de l'imam Hussein se voyant contraint de le faire clandestinement. Cette Achoura, sans Saddam Hussein, a donc été l'occasion pour la communauté chiite de rétablir une tradition ancestrale, d'où les importants rassemblements dans les villes saintes chiites, telle Kerbala, les mosquées et les mausolées consacrés, comme celui de l'imam Moussa Kazem à Bagdad. Le bilan est tout simplement effarant avec près de 150 morts et près de 400 blessés à Kerbala et Bagdad, selon les indications fournies par la police et les hôpitaux de la ville. Toutefois, ce bilan ne serait que provisoire et est appelé sans doute à augmenter. Ainsi, d'après les premières indications de la police il y eu pas moins de neuf attentats simultanés dans cette ville sainte chiite située au nord-ouest de la capitale Bagdad. Dans cette dernière ville, le bilan, aussi lourd, s'établissait en milieu de journée d'hier à 58 morts et 128 blessés. De fait les images du carnage montrées par les télévisions satellitaires arabes étaient effroyables. A Kerbala, selon un porte-parole de la police, «Les explosions ont été provoquées par les tirs d'au moins six roquettes à partir de la zone de Hyabi, au nord de la ville, sur le mausolée d' Abbas». Cet attentat contre le mausolée de l'imam Abbas n'est en fait que l'un des neuf attentats suicide commis ayant ciblé les lieux de culte chiites au moment même où les foules se pressaient vers les différents mausolées de la ville. Donnant un premier bilan pour l'attentat de Kerbala, le magistrat instruisant l'enquête, Ahmed Al-Hillali a indiqué «Nous avons 85 morts et 240 blessés» précisant que ces chiffres venaient de sources hospitalières et policières. A Bagdad, le ministre de la Santé du Conseil transitoire, Khodayyir Abbas, qui venait de visiter quelques hôpitaux de la capitale a indiqué «Je me suis rendu dans quatre hôpitaux, il y a 58 morts et 128 blessés mais ce bilan peut encore augmenter car des gens continuent d'arriver». Tous ces attentats seraient le fait de kamikazes, comme l'indiquent des témoins qui disent avoir vu un kamikaze se faire exploser au milieu de la foule faisant 25 morts à Kerbala. Les forces américaines étaient hier dans l'expectative. C'est ainsi qu'un communiqué a été rendu public hier à Bagdad dans lequel le commandement militaire américain affirme n'avoir aucun lien avec ces attaques simultanées survenues à Bagdad et Kerbala. «Ceux qui perpètrent ces attaques sont des lâches et des terroristes. La 1ère division blindée (américaine) peut confirmer que les évènements de ce matin ne résultent en rien d'une opération militaire de (nos) forces militaires», ajoutant «C'est regrettable que certains tentent d'empêcher le peuple irakien de recouvrer ses libertés». Dans un pays sous le choc de ces terribles carnages l'un des rares officiels ayant réagi a été le membre sunnite du Conseil transitoire de gouvernement, Nassir Chaderchi, qui a accusé les «terroristes étrangers» d'être derrière cette multiplication des attentats, déclarant «Cette bande terroriste ne peut pas appartenir à l'Irak (...) et les peuples irakien et arabe rejettent ces actes» affirmant «ces attentats ne vont pas entraver le processus de transfert (du pouvoir aux Irakiens)».