L'assassinat du militant Mohamed Brahmi jette la Tunisie dans la tourmente Finalement, le Printemps arabe n'a pas réellement bénéficié aux islamistes qui ont joué aux révolutionnaires de la 25e heure. En cette journée chômée, marquant le 56e anniversaire de la République, la Tunisie ne voit pas le bout du tunnel. L'assassinat, jeudi dernier, du député de l'opposition de gauche, Mohamed Brahmi, a accentué la crise dans ce pays désormais écartelé entre deux camps: les pro et les anti-Ennahda. L'oeil rivé au Caire où l'armée a déposé le président Mosri, pourtant démocratiquement élu, nombre de Tunisiens caressent aujourd'hui le rêve d'un scénario à l'égyptienne. La Tunisie attend donc son «Sissi», comme en Egypte, qui jaillira des rangs de l'armée pour les débarrasser d'Ennahda de Rached Ghannouchi. Jeudi dernier, quelques heures après l'assassinat du député Brahmi, la rue a donné la réplique en exprimant haut et fort son hostilité au parti au pouvoir directement accusé d'être derrière ce deuxième assassinat politique en six mois. «La Tunisie est libre, dégagez les Frères», ont scandé des manifestants dans la capitale, en référence aux relations étroites entre Ennahda et la confrérie des Frères musulmans en Egypte. «Ghannouchi assassin», «Ennahda doit tomber aujourd'hui», «L'Assemblée constituante doit être dissoute», se sont indignés les manifestant dans les rues de Tunis. Ecoeurés par la gestion catastrophique menée par le parti de Ghannouchi, l'anarchie et l'incompétence qui règnent dans le pays, l'insécurité, le recul des libertés individuelles et collectives, l'incapacité de répondre à la demande sociale, des voies s'élèvent en Tunisie pour faire partir Ennadha du pouvoir qui a échoué après deux années de règne et de tergiversations. L'heure des généraux a-t-elle sonné en Tunisie? Traditionnellement à l'écart du jeu politique, l'armée tunisienne a marqué l'opinion internationale par son rôle lors de la révolution des Jasmins en désobéissant au président Ben Ali qui l'a sommée d'intervenir. Zine Al Abidine était, lui même, issu des rangs avec un grade de général. Mais il a commis la grave erreur de la laisser à l'écart lui préférant les services de la police. Ce sont les généraux qui ont ordonné l'arrestation des membres de la famille Trabelsi qui tentaient de fuir à l'étranger et ce sont ces mêmes généraux qui ont opposé un niet catégorique de tirer sur les foules. Finalement, des armées arabes sont capables de se distancer du régime qu'elles ont souvent aidé à régner ou à protéger. Anticipant sur les événements, les hauts responsables tunisiens réagissent par déclarations interposée. Pour le chef du parti Ennahda au pouvoir depuis octobre 2011, Rached Ghannouchi, pour le président Moncef Marzouki, et pour les responsables du gouvernement, les assassins ont comme objectif premier de faire capoter la transition démocratique et démontrer que le Printemps arabe tunisien est un échec. Mais est-ce suffisant pour éviter une nouvelle incursion de l'armée dans la vie politique comme elle l'a déjà fait? L'échec d'Ennahda a été tel que la Tunisie entière se trouve plongée dans un marasme et une ambiance délétères. En pareilles circonstances et face à une dérive totalitaire, l'armée est la seule structure organisée et le seul rempart contre toutes les aventures islamistes. Finalement, le Printemps arabe n'a pas réellement bénéficié aux islamistes qui ont joué aux révolutionnaires de la 25e heure. L'opportunisme de ces derniers n'aura duré que quelques saisons avant que les populations ne déchantent. Les citoyens veulent des réponses concrètes à leurs soucis quotidiens et non des promesses de paradis ou des discours religieux dont usent et abusent les dirigeants islamistes.