Depuis le milieu des années quatre-vingt, et plus encore depuis l'éclatement de la grande crise économique des années quatre-vingt dix, sous l'effet du remède de cheval administré par le FMI et la Banque mondiale, on assiste à une transformation remarquable des classes moyennes en Algérie. Au lendemain de l'indépendance déjà, on avait assisté à une première évolution qui a vu la disparition presque complète, à la suite des bouleversements qui ont suivi la libération du pays et l'instauration d'un «socialisme spécifique», d'une classe moyenne traditionnelle faite de commerçants, de petits entrepreneurs et de professions libérales (en majorité des colons qui ont dû quitter le pays). Elle s'était transformée petit à petit en une classe moyenne d'un autre type, constituée en majorité de cadres - supérieurs et moyens - chargés de l'application, du développement et de la protection du système politico-économique mis en place par les nouveaux maîtres du pays. Aujourd'hui, suite aux revirements idéologiques qui ont suivi les événements d'octobre 1988 et l'option prise pour l'instauration d'une économie libérale, la classe moyenne algérienne a pris un nouveau tournant et recommence à ressembler à l'image qu'elle donne traditionnellement d'elle dans le monde entier. La classe des cadres au service de l'Etat et de ses démembrements qui tenait le haut du pavé pendant les deux premières décennies de l'Algérie indépendante a basculé dans la paupérisation et est allée se confondre avec les classes les plus défavorisées: prolétariat, lumpenprolétariat et paysannerie.