forte était l'indignation des Espagnols. Des milliers de manifestants ont sillonné ,hier, toute la terre ibérique en signe de profonde désapprobation de l'atteinte criminelle de jeudi. A midi, tout le pays s'est figé dans le silence. Pendant une minute, l'Espagne s'est tue en mémoire des centaines de victimes. Dans la soirée, un grand rassemblement a eu lieu à Madrid en réponse à l'appel du gouvernement. Dans une atmosphère lugubre où les façades se sont spontanément mouchetées de rubans noirs et les drapeaux mis en berne, le Premier ministre espagnol, M.Aznar accompagné de ses homologues français et italien ont marqué leur présence en se mêlant à la foule en deuil. Lors du premier jour du massacre terroriste, des manifestants se sont relayés toute la nuit à Puerta Del Sol, dans le centre de Madrid. Le deuil se poursuivra aujourd'hui tel qu'il a été décrété par les autorités officielles (trois jours). Au-delà des afflictions causées par la perte de tant de vies humaines, mais aussi par l'appréhension de l'insécurité, les réactions officielles sur l'origine du drame vont crescendo. Le premier à rompre le silence fut le roi Juan Carlos. Dans une déclaration solennelle faite jeudi soir, il s'est dit «profondément attristé par cet attentat qui est venu à coup sûr endeuiller notre peuple». Comme il a promis une «guerre» sans merci aux terroristes ayant perpétré «ce crime crapuleux» tout en laissant le soin aux autorités compétentes d'identifier «tous les commanditaires sans exception». L'intervention du roi est fort significative étant donné qu'elle est précédée de 25 minutes de silence. «Les Espagnols réussiront à en finir avec la bande terroriste», a déclaré, pour sa part, José Maria Aznar juste après les attentats meurtriers. Il a pointé un doigt accusateur sur les séparatistes basque de l'ETA. 48 heures après le carnage, la même réaction a été constatée du côté de toutes les voix officielles du gouvernement. «La piste prioritaire de l'enquête reste l'ETA. Mais il faut être très prudent et enquêter sur d'autres pistes», a signalé le ministre espagnol de l'Intérieur, Angel Acerbes. Plus fermement, le porte-parole du gouvernement de Aznar, Eduardo Zaplana, n'a émis aucun doute quant à la responsabilité exclusive des séparatistes basques. «Tout mène à la bande terroriste criminelle ETA», a-t-il annoncé, jeudi soir, à la télévision publique TVE. Il a même affirmé pouvoir «démentir catégoriquement l'hypothèse d'un attentat suicide» avancée par la radio privée Cadena Ser et Arnoldo Otegi, ancien membre de l'ETA et porte-parole de la formation indépendantiste basque Batasuna. Ce dernier a écarté la thèse que l'ETA ait pu commettre un tel «massacre». M.Otegi a «énergiquement» condamné les attentats tout en privilégiant la piste islamiste. La réplique de Aznar ne s'est pas fait attendre suite à cette «disculpation». «Je dois aussi dire que le gouvernement ne concède et ne concèdera aucun crédit aux déclarations de porte parole de formations illégales qui disculpent ou parlent au nom d'organisations terroristes qui ont déjà provoqué des centaines de victimes.» La presse espagnole, audiovisuelle et écrite(sportive comprise), commentant la catastrophe, a parlé d'un «11 septembre espagnol». Les chaînes de télévision ont montré sans interruption des images témoignant de l'atrocité des actes terroristes. En guise de mesures d'urgence, M.Aznar a décidé de régulariser, à titre extraordinaire, toutes les familles en situation illégale qui ont été touchées par la catastrophe. De plus, il a débloqué 140 millions d'euros pour toutes les victimes.