La mort au Tchad du n°2 du Gspc va entraîner de profondes mutations dans l'organisation. Après une traque qui l'avait amené dans trois pays, le Mali, le Niger et le Tchad, Ammari Saïfi, dit Abderezak Le Para a été abattu, mercredi, par les forces de sécurité tchadienne dans la région du Tibesti. L'information qui avait été donnée au conditionnel, attisait déjà les curiosités, depuis que l'armée tchadienne avait annoncé avoir mis «hors d'état de nuire» un groupe du Gspc. En fait, il s'agissait d'un conglomérat de groupes et d'hommes, menés par «le Para». Les 43 personnes étaient de nationalité tchadienne, nigérienne, nigériane et algérienne (9 hommes) menées dans une folle course par le n°2 du Gspc. Les sources qui ont confirmé avant-hier, sa mort, ont surtout insisté sur le fait, que le Para avait parcouru plusieurs milliers de kilomètres avant d'être abattu dans un accrochage avec l'armée tchadienne. C'est donc la fin de parcours d'un émir particulièrement entreprenant et qui a défrayé la chronique par plusieurs attentats et enlèvements spectaculaires, telle l'embuscade de Batna, au début de l'année 2002 et qui a coûté la vie à 45 militaires dans la région de Batna. Dès le début de l'année 2003, Abderezak le Para fait scission avec Hassan Hattab et signe son premier attentat de chef de guerre avec l'enlèvement, en mars, de 32 touristes européens dont les pérégrinations devaient le conduire de Amguid à Kidal. Le coup de force exceptionnel qu'il entreprit, en sortant indemne d'un maillage militaire quasi hermétique, puis la fuite vers Kidal, au Mali, avec 14 touristes comme bouclier humain, avaient fait la une de la presse internationale pendant plusieurs semaines. Curieusement c'était ce coup d'éclat médiatique qui le perdra. Isolé au Mali, sans l'appui de Mokhtar Belmokhtar, émir du Sud et grande connaisseur du Sahara, il achètera les complicités au Mali avec l'argent payé par les autorités allemandes pour récupérer leurs ressortissants. Mais cela ne lui sera pas d'un grand secours dans ces grands espaces désertiques du Sahel. Le groupe de douze hommes qu'il avait envoyé aux maquis du Nord algérien sera décimé par l'armée à In Salah. L'étau commençait à se refermer sur ses hommes au nord du Mali. Il rejoint le Niger, puis le Tchad. Le commerce des armes légères et semi-lourdes qui fleurit à la périphérie de N'djamena n'est pas le seul motif de cette nouvelle étape. En fait, les autorités tchadiennes sont confrontées à de graves conflits politiques, notamment avec le Mdjt, dont le fief du Tibesti paraît inexpugnable. C'est là qu'Ammari Saïfi trouvera refuge, s'achètera des alliances, scellera des contrats et se procurera les armes nécessaires pour son retour en Algérie. Ce retour n'aura pas lieu: trop sûr, confiant à l'excès, il tombera dans une embuscade tendue par l'armée tchadienne aux groupes armés du Mdjt, et après un violent accrochage, il est retrouvé mort, criblé de balles. Natif de Guelma en 1968, Ammari Saïfi était un brillant sous-officier à l'école d'application de Biskra. Parachutiste de formation, c'est là qu'il fait la connaissance d'un autre futur chef du Gspc, «Okacha le Para». A 25 ans, il est touché de plein fouet par la poussée de fièvre islamiste et intègre les structures actives du FIS. Déserteur de l'armée, il rejoint le GIA en 1993, et se retrouve vite parmi les chefs. En 1996, il rejoint Hassan Hattab dans la zone II (Boumerdès et Kabylie) et à la création du Gspc, en 1998, il forme le «quatuor de choc» de l'organisation avec Hattab, Okacha et Nabil Sahraoui. Emir dans la région de M'sila et Bouira, il destitue, en 2000, Nabil Sahraoui, et prend le commandement des maquis de l'Est (Batna, Souk Ahras, Tébessa, etc.). A partir de 2002, il réclame ouvertement l'émirat national et commence à faire pression sur Hattab. Avec l'aide de Nabil Sahraoui (qu'il récupère et met à la tête de la zone est) et MBM, émir du Sud, il tente un coup de force pour destituer Hattab. Les choses restant floues, il part pour le Sud, en janvier 2003, et entame son long parcours qui le mènera de Kidal à Tibesti. L'enfant de Guelma avait eu, à 35 ans, la terrible envie de faire parler de lui à grande échelle...